L'incontournable du football africain
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Sélectionneurs en Afrique, sous et dessous d’un « soft » métier

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Lors de la CAN-2024 jouée en Côte d’Ivoire beaucoup se réjouissaient de la présence d’entraineurs africains à la barre technique de nombreuses sélections nationales.

Outre l’algérien Djamel Belmadi qui coachait les Verts, le comorien Amir Abdou était aux commandes de la Mauritanie, le tunisien Jalel Kadri dirigeait les Aigles de Carthage, le Sily National de la Guinée placés sous les ordres du Guinéen Kaba Diawara, les Lions de l’Atlas du Maroc confiés au marocain Walid Regragui, les Taifa Stars de Tanzanie entrainés par l’algérien Adel Amrouche ou encore les Lions de la Téranga du Sénégal placés sous les ordres du sénégalais Aliou Cissé.

Certains fêtaient alors leur première CAN tandis que d’autres comme Cissé, Belmadi, ou Kadri étaient respectivement à leur cinquième, troisième et deuxième phase finale d’un tournoi continental. Une présence qui faisait la fierté des uns mais pas d’autres « africanistes », plutôt adeptes du modèle européen.

En terre Ivoirienne, les entraineurs venus du vieux continent n’étaient pas en nombre (9 au total) mais trois et… demi ont atteint le dernier carré. Il s’agit du français Jean-Louis Gasset limogé par la fédération Ivoirienne après le premier tour et remplacé par son adjoint, Emerse Fae qui emmènera les Eléphants au titre suprême, du portugais Jose Peseiro(Nigéria), du belge Hugo Broos (Afrique du Sud) et d’un autre français, Sébastien Desabre (RD Congo).

Proportionnellement, le produit européen s’avère plus rentable. Ceux qui ont validé cette voie avaient-ils pour autant raison ? Savaient-ils au moins que l’européen coûte cher aux faibles trésoreries des fédérations africaines et que par-dessus tout, l’expérience tentée ne va pas s’éterniser. L’un des rares entraineurs européens, le français Claude Leroy en l’occurrence, a survécu à la tentation de changer de continent pendant plus de trente-six ans. Il était le sélectionneur du Cameroun en 1985 et a mis fin à sa collaboration avec le Togo en 2021 après avoir disputé la 31è CAN-2017 au Gabon. Le « Sorcier blanc » comme il était surnommé affectueusement en Afrique a pris part à 9 phases finales à la tête de six sélections africaines (Cameroun, Sénégal, RD Congo, Ghana, Congo et Togo) et a remporté deux titres majeurs: la CAN-1988 avec le Cameroun et la Coupe afro-asiatique en 1985 à la barre technique des Lions Indomptables.

D’autres « mercenaires », dont son élève et lieutenant Hervé Renard, Pierre Lechantre et Henri Michel ont adoré travailler en Afrique. Leurs aventures ont toutes fini de manière brutale, la séparation ayant été décidée pour chacun de ces faiseurs de bonheur par un prince aigri, un président pris à la gorge par ses opposants ou bien un président de fédération incapable de tenir ses promesses en raison de l’infortune de son instance. C’est ainsi que sur nombre des entraineurs européens qui ont préféré changer d’air à l’orée de la CAN-2024, à l’exemple du portugais Peseiro, finaliste avec le Nigéria, l’ont fait pour de l’argent. Ceux qui sont restés, comme le belge Hugo Broos, ont obtenu ce qu’ils avaient réclamé comme augmentation et extras.

Locaux ou étrangers, l’éternel tiraillement

D’autres ont été, par contre, virés à cause de leurs forts émoluments et les résultats qui n’étaient pas en adéquation avec les objectifs qui leur ont été fixés. L’on peut citer le portugais des Pharaons, Rui Vitoria dont le contrat était conditionné par la réussite de cet objectif que des entraineurs locaux n’ont pas réalisé non plus, à l’instar de l’algérien Djamel Belmadi, le tunisien Jalel Kadri ou le marocain Walid Regragui. Les deux premiers, sur la sellette depuis pas mal de mois, ont été balancés aussitôt la compétition africaine terminée tandis que Regragui a été sauvé par l’exploit qu’il avait accompli avec les Lions de l’Atlas un an plus tôt au Qatar, lors de la Coupe du monde.

Une telle hécatombe dans le corps des entraineurs suite à un objectif raté, l’Afrique a souvent connu. A chaque phase finale, c’est pas moins d’une dizaine d’entraineurs, étrangers et/ou locaux, qui sont promis aux remerciements anticipés. Une séparation généralement peu réfléchie, les changements opérés intervenant alors que les sélections doivent rapidement répondre aux échéances suivantes. D’où, logiquement, la difficulté de trouver un nouvel entraineur qui puisse déclencher la dynamique du succès. L’Algérie et la Tunisie ont viré Belmadi et Kadri alors que leurs sélections sont bien lancées dans les éliminatoires du Mondial 2026 lesquelles reprendront en juin prochain. La fédération algérienne a trouvé un successeur à Belmadi qui n’était pas nécessairement celui recherché et souhaité alors que la fédération tunisienne est toujours en quête d’un président qui, de son côté, doit choisir un nouveau sélectionneur. Le report des élections d la FTF à mai prochain ne va pas arranger les affaires des Aigles de Carthage qui vont accueillir en juin prochain la Guinée Equatoriale avant de se déplacer en Namibie durant le même mois.

L’exemple algérien

Encore que, sans sélectionneur régulièrement désigné par une fédération élue, les tunisiens sont à même de mieux réussir la transition en confiant la transition à une paire locale (Boussaidi- Louhichi) qui saura offrir de bien meilleures garanties qu’un Petkovic qui découvre l’Afrique après deux années de chômage technique. Son intronisation à l’occasion du prochain tournoi Fifa Series ne sera, en définitive, qu’une première étape dans sa mission de reconnaissance des troupes. D’ailleurs, le choix de la première liste des joueurs pour les rencontres contre la Bolivie (22 mars) et l’Afrique du Sud (26 mars) suscite l’intrigue chez beaucoup d’observateurs algériens. La convocation de certains nouveaux joueurs marque la perplexité voire la méconnaissance de ceux qui ont validé la liste devant la réalité du football algérien.

Dans moins de trois mois, les Fennecs seront de retour sur la scène continentale en étant privés du capitaine Mahrez, du buteur historique de la sélection Slimani et de la coqueluche des Chnaoua, surnom des fans du MC Alger, Belaili.

Composer avec un défenseur local (Madani, CSC) dont la première chez les Verts intervient au crépuscule de sa carrière(32 ans) et faire revenir Brahimi (34 ans) après deux années de mise à l’écart font dire au public algérien que la liste des 31 joueurs a été façonnée par Nabil Neghiz et visée par… Walid Sadi, le président de la FAF. Un patron du football algérien par trop pressé de liquider Djamel Belmadi et les vedettes qui souhaitaient son maintien aux affaires de la sélection algérienne. Un divorce qui n’a pas encore livré tous ses secrets tant que Belmadi n’a rien déclaré et que la FAF est plutôt affairée par l’installation de Petkovic.

A telle enseigne que les algériens se sentent divisés lorsqu’ils sont interpellés sur la situation des Rois d’Afrique en 2019.

Ceux qui pensaient que Belmadi doit partir sont moins convaincus aujourd’hui à comprendre la logique de la fédération à livrer la destinée de l’EN Algérienne à un entraineur dont le palmarès n’est pas si élogieux que ça. Ils attendent, en tout cas, l’image que renverra l’équipe à l’occasion du tournoi Fifa pour se fixer définitivement sur un avis par rapport à l’arrivée de Vladimir Petkovic.

Pour les autres, ceux-là qui ont milité pour le maintien de Belmadi et de la dynamique enclenchée depuis 2018, en dépit des coups de massue reçus en 2022 et cet hiver en Côte d’Ivoire, le moindre faux pas ou imperfection viendra conforter leur conviction que l’évincement de Belmadi est plus un acte de sabotage qu’une décision salutaire pour remettre l’Algérie sur rails.

L’argent du peuple

C’est donc plus une affaire de sous qui empêche la plupart des fédérations africaines à confier le rôle de patron technique à des entraineurs locaux.

En effet, l’exception algérienne mise à part, Belmadi a été limogé parce qu’il avait aussi un gros salaire à encaisser chaque mois (206.000 euros), le choix d’un entraineur du crû pour les équipes africaines obéit à la disponibilité de cet argent qui fait, en définitive, languir les coopérants européens. Car, quand on apprend que Jose Peseiro, finaliste malheureux de la CAN-2024, ne percevait que 50.000 dollars au Nigéria et le salaire proposé à Emerse Faé, intérimaire de Gasset redevenu sélectionneur des Eléphants, n’est que de 50.000 euros, tandis que le sénégalais Aliou Cissé touche 46.000 euros, il n’est pas étonnant d’affirmer que la vraie raison est d’ordré pécuniaire.

Les médias et les réseaux sociaux ont beau s’égosiller à relever le côté affectif voire communautaire que peut nourrir la mise en place d’un staff local chez les supporters et le peuple en entier, mais le mensonge parait gros, grotesque même, quand on découvre le pot aux roses. Celui- ci indique que les fédérations africaines dans leur globalité ont les ressources financières qu’il faut, publiques s’entend, pour se payer des entraineurs étrangers de renom mais préfèrent opter soit pour un coach local « bon marché » et surtout obéissant sinon pour un entraineur « made in » qui ne laissera pas de casseroles ni de traces tangibles s’il venait à être licencié au bout d’une courte pige.

Le spectre de voir les plaintes portées par ces entraineurs étrangers devant les juridictions spécialisées de la Fifa ou le TAS de Lausanne aboutir n’inquiètent pas outre mesure ces fédérations dont les responsables savent qu’eux-mêmes ne seront plus là quand la sélection fera naufrage. Donc, pas du tout obligés à payer les pots cassés. Au pire, les fédérations récalcitrantes verront les attributions financières de la Fifa accordées dans le cadre de l’aide au développement du football réduites comme une peau de chagrin afin de régler les contentieux, jamais tel ou untel dirigeant ne sera poursuivi pour « mauvaise gestion » ou « dilapidation des biens publics », encore moins pour avoir provoqué des émeutes suite à un cuisant échec de la sélection. L’Afrique est ainsi…

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