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Entretien exclusif : “L’avenir du football togolais est féminin”, Kaï Tomety

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Depuis 2006, le Togo a signé son existence dans le football féminin international. Mais il lui a fait plus de 15 ans pour arriver à se signaler réellement sur l’échiquier continental. La sélection des Eperviers Dames du Togo a fait ses premiers pas à la CAN lors de l’édition 2022 au Maroc.

Une ambition concrétisée par Kaï Tomey, actuelle sélectionneuse de l’équipe togolaise. Elle est entrée dans l’histoire et en parle dans un entretien accordé à Africa Foot United.

Bonjour coach, veuillez vous présenter à nos lecteurs s’il vous plaît.

Je me nomme Kaï Tomety et je suis enseignante à l’Institut National de la Jeunesse et des Sports de l’Université de Lomé. Je suis sélectionneuse des Eperviers dames du Togo, chef projet TDS (Programme de détection des talents de la FIFA) et institutrice internationale sport pour le développement.

Avec vous, le Togo a connu sa première CAN féminine. Ça fait quoi d’entrer dans l’histoire de sa Nation ?

Je dirai simplement que c’est une fierté, c’est une joie d’écrire cette page de l’histoire. C’est une vision que j’avais eu depuis 1998-1999 quand je m’apprêtais à quitter le terrain, car j’ai été moi-même joueuse. Quand je suis arrivée à l’université pour embrasser la carrière d’entraîneur en choisissant l’option foot à l’INJEPS, je me suis dit : qu’est-ce qu’il faut faire pour les jeunes sœurs qui sont en train de me suivre ? Parmi ces filles, je voyais encore beaucoup de potentialités, beaucoup de talents. Et j’ai conçu ma vision sur la promotion de football de jeunes pour le développement du football féminin du Togo. Après la maîtrise, je suis entrée en plein dans le coaching et j’ai poursuivi le rêve, je me suis fixé des objectifs. Une fois nommée à la tête des Éperviers dames, je me suis battue. J’ai mis en branle tout ce que j’avais eu comme résultats de mes recherches quand j’écrivais mon mémoire sur la promotion du football des jeunes filles pour le développement du football féminin au Togo. Et c’est ça qui a porté ses fruits aujourd’hui. Donc la qualification, ce n’était pas un truc au hasard. Mais c’était une vision, c’était un rêve que j’ai eu à réaliser.

Revenons sur les éliminatoires de la CAN 2022. Quelle a été la clé de ce succès ? Puisque beaucoup ont échoué avant vous. Mais vous avez réussi.

C’est parce que mon staff et moi avons su insuffler un dynamisme au niveau de mes joueuses. On leur a inculqué cette notion d’engagement, de détermination, de cohésion sociale, d’entraide. Et c’est cette communion d’esprit, cette union, l’envie d’aller vers l’avant, qui nous a qualifié en 2022 contre le Gabon (2-1).

Ensuite, vous avez fait une belle expérience à la CAN qui s’est malheureusement arrêtée au premier tour.

Oui, c’est un autre niveau. C’est l’élite. Et quand on rentre dans l’élite, il y a pas mal d’exigences. Donc, on a tiré beaucoup de leçons, on a beaucoup appris de cette participation. Et l’élément clé, c’est le travail. On doit beaucoup travailler et on doit mettre assez de choses pour l’organisation. Ce sont les équipes qui s’organisent mieux et qui se préparent mieux qui font de belles choses à la CAN. La leçon à retenir, c’est que nous devons faire plusieurs matchs amicaux, faire beaucoup de regroupements et rendre encore plus dynamique notre championnat pour avoir de meilleures joueuses afin de participer à ces genres de compétition.

Par la suite, il fallait encore retourner à la CAN. Mais ça a été difficile.

Oui, c’était notre souhait. On s’est fixé l’objectif d’y retourner parce qu’on n’a pas été ridicule à la première participation. Et on voudrait vivement y retourner. Mais cette fois-ci, on a échoué sur des détails. On a vraiment échoué sur des détails. Tout ce qui a manqué, c’est la cohésion d’équipe, la coopération, la solidarité. Mais c’est un truc qui nous a beaucoup embêté, parce qu’il y a eu une histoire qui n’avait pas sa place. Un problème extra-sportif qu’on a dû habiller pour le rendre sportif. Et c’est ça qui a créé un peu de zizanie entre les filles. Et la communion d’esprit qu’on avait avant de jouer contre le Gabon n’y était pas et les résultats sont là. Mais c’est des détails, on a compris et on a tiré des leçons. Je pense que désormais les filles ne vont plus accepter être infiltrées pour qu’il y ait de désunion entre nous, pour aller de l’avant.

Comment appréciez-vous le niveau du championnat féminin de football au Togo ?

Comparativement dans la sous-région, je dirai que, après le Nigéria, le Ghana, le Sénégal, aujourd’hui le Togo a les armes pour jouer avec toutes les nations qui se présentent au niveau du football féminin. Donc notre championnat, je ne vais pas le qualifier de faible ni de fort. Mais c’est un championnat moyen et il faut encore lui donner plus de tonus pour que nos filles puissent jouer les premiers rôles quand elles sont à l’étranger.

Que manque-t-il selon vous au championnat féminin togolais pour réellement se mesurer à d’autres championnats comme ceux du Ghana ou du Maroc ?

Le Togo a ses réalités et on a beaucoup d’élèves dans ce championnat. Ce qui fait que le championnat se joue en zone. Mais après la zone, il faut faire un play-off pour les meilleurs. Et je me dis que quand nous aurons plus de 15 à 20 journées de championnat, ça va faire que les filles auront beaucoup plus de compétitions dans les jambes et ça va plus les formater. Mais si c’est des championnats qu’on va jouer à 7 ou 10 journées, ça ne donne pas assez de matières pour les filles. Donc on doit revoir le format ou l’organisation pour qu’il y ait beaucoup plus d’activités, plus de jeux ou plus de matchs pour qu’elles puissent se mettre en jambes.

Le Togo (équipe masculine) n’est plus à la CAN depuis un moment. Comment appréciez vous cet état de choses ?

C’est une triste réalité. Ça fait mal de ne pas voir le Togo à la CAN avec ce format de 24 équipes. On a raté de peu la qualification. Il fallait gagner peut-être le match contre Eswatini ici pour pouvoir se qualifier. Mais malheureusement ça n’a pas été le cas. Je pense que actuellement l’équipe a changé. La performance commence par s’installer. On n’a plus les résultats d’avant, progressivement les choses changent. C’est vrai qu’on avait connu une crise après la participation du Togo à la Coupe du Monde (2006) et cette crise a duré dans le temps. Mais je pense que les sélectionneurs qui sont passés ont essayé de combler ce vide là. Tout ce qui mine ce football, c’est qu’il n’y a pas eu de renouvellement. La transition a été mal effectuée. Des joueurs cadres qui sont partis, on n’a pas su les remplacer valablement. Ce qui fait que ça a créé un vide dans la reconstruction de l’équipe. Mais bon, il y a de nouveaux joueurs qui se manifestent et je pense que le vide est en train de se combler. En 2026, le Togo sera à la CAN.

Votre mot de fin pour boucler cette entrevue

Je vais citer une autorité du football qui dit que “l’avenir du football est féminin”. Et moi je peux paraphraser Sepp Blatter en disant : l’avenir du football togolais est féminin. Donc j’exhorte les autorités et tout le peuple à encourager les femmes à aller jouer et à investir dans le football féminin pour que d’ici 5 ans, les filles togolaises puissent aussi jouer la Coupe du Monde. Aujourd’hui, on a beaucoup de talents. Nous avons juste besoin d’accompagnement et de soutien pour pouvoir porter plus haut le drapeau togolais sur l’échiquier international.

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