La Kadji Sports Academy (KSA) et la FECAFOOT sont au centre des débats dans l’espace public camerounais depuis trois jours déjà, en raison d’une décision de la commission d’homologation et de discipline de la Ligue régionale de football du Littoral.
La KSA, un monument du football camerounais !
La Kadji Sports Academy est de loin la plus grande académie de football au Cameroun. Bâtie sur plus d’une dizaine d’hectares à l’entrée de la ville de Douala il y a plus de 25 ans, la KSA a formé plusieurs générations de joueurs devenus plus tard des internationaux camerounais. Samuel Eto’o, Benjamin Moukandjo, Éric Djemba Djemba, Modeste Mbami, et bien d’autres encore, la KSA a pendant longtemps été le principal pourvoyeur de talents aux clubs camerounais et aux sélections nationales du Cameroun. Même si l’académie semble avoir perdu de sa superbe sur les 10 dernières années du fait de la forte concurrence de l’EFBC, la KSA reste une institution iconique, un monument pour le football camerounais. Au début des années 2000, le 11 des titulaire chez les Lions Indomptables était très souvent constitué de 5 à 6 joueurs formés à la KSA. La KSA est donc plus qu’une simple académie, elle est pour la formation camerounaise ce que sont Samuel Eto’o et Roger Milla pour les joueurs camerounais.
La paume de discorde : les licences !
Mercredi dernier 12 juin 2024, la commission régionale d’homologation et de discipline de la Ligue régionale de football pour le Littoral a rendu une décision en défaveur de la KSA. L’académie qui disputait le championnat régional (D3) a été déclarée forfait général en Ligue Régionale du Littoral et reléguée de deux divisions par la commission. En outre, comme le prévoient les textes, son président, Gilbert Kadji, est suspendu pour 5 ans de toute activité liée au football et frappé d’une amende de 5 millions de FCFA. Tout ceci conséquemment aux absences lors de plusieurs journées du championnat.
Dans la foulée le lendemain, le club a introduit une requête auprès de la chambre de recours de la FECAFOOT, puis organisé une conférence de presse pour expliquer à l’opinion publique toutes les péripéties traversées dans cette affaire liée à la délivrance des licences à ses joueurs. Face à la presse, Gilbert Kadji, le président de la KSA indique preuve (décharges) à l’appui, avoir introduit dans les délais dans le système FIFA Connect, les dossiers de demande de licences pour un total de 54 joueurs. Le 19 avril, le club est notifié de la délivrance des licences pour 11 joueurs parmi lesquels 3 gardiens de but. Le motif du rejet des 43 autres devient un mystère, explique le président de l’académie qui va saisir tour à tour la Ligue régionale et la fédération (trois fois) pour demander les raisons du rejet, en vain. Le championnat régional débute, le club est contraint de jouer ses matchs à 9 contre 11.
Après 3 journées et des relances sans réponses, le club décide de jeter l’éponge. Il saisit la CAF qui à son tour réexamine le dossier, et ne contacte aucune incorrection, puis demande à la fédération de s’exécuter en délivrant les licences, la fédération reste sur sa position. Après 3 autres journées de championnat et l’absence constatée du club, la commission de discipline s’est réunie et a infligé à la KSA les sanctions susmentionnées, conformément à la réglementation en vigueur.
La réaction de la FECAFOOT
24 heures après la conférence de presse de Gilbert Kadji, la Fédération Camerounaise de Football comme elle n’en a pourtant pas l’habitude, a jugé nécessaire de sortir de sa réserve habituelle. Par un communiqué signé de son secrétaire général, l’instance faîtière du football camerounais a relevé une batterie de motif qui aurait conduit à la non délivrance des licences au club. En précisant à son tour, sans preuve, avoir notifié le clubs des motifs du rejet. Ces motifs contenus dans son communiqué sont les suivants :
- Carte Nationale d’Identité de joueur non légalisée;
- Carte Nationale d’Identité de parent non-légalisée pour les mineurs);
- Absence de Carte Nationale d’Identité de joueur;
- Carte Nationale d’Identité de parent illisible;
- Formulaire d’enregistrement non-conforme;
- Absence de reçu de paiement des frais de licences;
- Absence de certificat national de transfert (pour les joueurs en provenance d’autres clubs);
- Certificat médical illisible.
Tous ces motifs ont d’après la fédération, donc conduit la fédération à rejeter 43 des 54 demandes de licences de la Kadji sports academy.
Et pour la suite ?
Il est clair qu’il y a un épisode de cette affaire qui reste inconnu. Pourtant passé par la Kadji Sports academy avant de s’envoler pour l’Europe, Samuel Eto’o n’est plus en bon termes avec la famille Kadji, qui détient aussi la marque UCB qui fait fortune dans les boissons gazeuses au Cameroun. Depuis les élections à la fédération où Eto’o n’avait pas eu le soutien de la KSA, les relations ont commencé à s’effriter. L’animosité entre les deux parties a atteint son apogée lors de la CAN 2021 au Cameroun. Alors que UCB avait l’exclusivité des boissons de la compétition et devait figurer sur toutes les annonces publicitaires, Samuel Eto’o alors nouvellement élu président de la FECAFOOT avait cédé les fans zones aux brasseries du Cameroun, concurrent de UCB. Mécontent, UCB avait porté l’affaire en justice, et la FECAFOOT avait été condamnée à payer 300 millions à UCB en raison d’interférence dans son contrat. Face au refus de la fédération de payer, la CAF avait fait une retenue à la source de l’argent de la FECAFOOT dont elle disposait pour payer UCB: chose que n’a jamais digéré Samuel Eto’o.
Au delà de ces considérations qui peuvent traduire une volonté de règlement de compte selon une certaine opinion, une nouvelle communication de la KSA, ainsi que la décision de la commission de recours sont attendus.
