La question traitée par Africa Foot United au sujet des ultras du CR Belouizdad, à l’issue du match de leur équipe face à l’Olympique Akbou en Coupe d’Algérie, et des arrestations qui s’en suivirent ont suscité le débat sur ce phénomène.
Ces derniers jours, des vidéos circulent sur les réseaux sociaux traitant de l’affaire des membres des Ultras Fanatics, du CR Belouizdad arrêtés, mais dont quelques-uns ont été libérés et d’autres mis sous mandat de dépôt suite aux échauffourées qui ont émaillé la rencontre des huitièmes de finale de Coupe d’Algérie entre une frange des supporters et les forces de l’ordre. Mais le fait divers, bien courant dans le monde du football, ne s’arrête pas là puisque d’autres pistes sont révélées sur d’éventuels tenants et aboutissants autour du phénomène des ultras en Algérie.
Utiliser la rue et les tribunes des stades de football en empruntant la voie des réseaux sociaux serait, selon certains observateurs et analystes, une nouvelle manière de créer la fitna et allumer la mèche entre les différents groupes de supporters des clubs, notamment ceux présentant un terreau fertile comme toucher à l’identité, à l’histoire, et à l’honorabilité du club, de ses hommes et de son patrimoine immatériel.
L’Algérie, tout comme d’autres pays du Maghreb et du Moyen-Orient, connaissent la montée en envergure des groupes ultras, phénomène qu’a connu l’Europe dans les années 1990 et 2000. Une Europe restée longtemps traumatisée par l’hooliganisme et par plusieurs drames, comme le Heysel (29 mai 1985 à Bruxelles) et d’autres, qui sont partis de l’univers des tribunes.
Pour revenir en Algérie, et lors de leurs sorties nocturnes, les membres des ultras du CRB scandaient ‘’Libérez nos frères’’ ou bien fredonnaient le refrain ‘’je suis un citoyen normal, je ne suis pas un terroriste et pourtant je suis épié’’, avec une signature en italien Liberta Pergli ultras, car le phénomène ultra algérien est souvent d’inspiration italienne. Sauf qu’il développé ses spécificités et ses propres codes.
Et c’est dans ce domaine que vont pêcher et … prêcher les spécialistes des eaux troubles, en montant les groupes de supporters entre eux. L’exemple le plus frappant est celui entre une frange des supporters de l’USM Alger qui tente de faire passer les Mouloudéens pour des traitres pour n’avoir pas suivi la décision du Front de libération nationale (FLN) en 1956 d’arrêter l’activité footballistique, en pleine guerre d’Algérie. Derrière le rideau, des mains habiles manipulent des jeunes qui ne connaissent de l’histoire que des bribes.
L’histoire de la doyenneté, exhumée vers la fin des années 90, entre le MCA (toujours) et cette fois-ci le CS Constantine, est également un sujet-prétexte qui empoisonne désormais les relations entre les fans des deux clubs depuis un moment.
Pis encore, dans une autre vidéo, un ancien membre d’un groupe ultra du Mouloudia d’Alger va plus loin dans son témoignage en affirmant que des cercles tapis dans l’ombre ont atteint leur objectif de faire sortir les jeunes dans la rue. Ce qui a contraint les services de sécurité, toujours selon ce témoin, à opérer des arrestations au sein des membres actifs de ces groupes qui, ne l’oublions pas, sont suivis de tout près.
Leurs constitutions, leur force de mobilisation, les thématiques de leurs tifos et leurs chants ainsi que leurs déplacements, sont épiés au moindre détail, surtout lorsqu’il s’agit de contrôler la rue et les supporters, composés d’une large frange de la jeunesse (15-25 ans).
Certains n’ont d’ailleurs pas hésité à voir un lien entre des sociétés de tabac du groupe Madar financées par un fond Emirati et faisant l’objet d’enquêtes, d’être derrière des manipulations sordides avec comme toile de fond les jeunes supporters du Chabab, par le biais des Ultras.
Kafkaïen ou pas, les déclarations du Président Abdelmadjid Tebboune en direction d’un pays arabe qui serait derrière des manœuvres visant à déstabiliser l’Algérie, ont versé de l’eau au moulin de ceux qui estiment que le phénomène des ultras de certains clubs, est pris en charge à desseins. Et les ramifications ne s’arrêtent pas là puisque des membres de groupes ultras seraient fichés et suivis pour s’être déplacés dans des pays où des conflits ont eu lieu, sous des relents bien politiques.
C’est dire qu’au-delà de l’ambiance folle des tribunes, des fresques offertes et tout le spectacle jaillissant, qui donnent au football ce brin supplémentaire de folie et de passion, le phénomène ultra inquiète au plus haut et se trouve sous tous les scanners des services de sécurité spécialisés.