L'incontournable du football africain
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MC Alger 1921 – 2023 : Des Hommes dans la vie du Mouloudia : Aouf, Drif, Zenir, la saga des gens heureux !

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Des hommes avec un grand « H », il en faut pour construire de gigantesques ouvrages. En 102 ans, le MC Alger a connu pas mal. Des chevilles ouvrières et des piliers mastodontes. Avec la même qualité morale, cependant : l’amour des couleurs et du club.

Si bien qu’il nous semble impossible de ne pas citer quelques uns qui ont fait l’histoire du Doyen. Abderrahmane Aouf, Abdelwahab Zenir et Abdelkader Drif paraissent comme des voies impénétrables.

Il fait partie des plus jeunes présidents des clubs algériens, si ce n’est le plus jeune, avant l’indépendance. Lui, c’est Abderrahmane Aouf né en avril 1902 et désigné premier président du MCA en août 1921. A juste 19 ans et quelques poussières. Malgré son jeune âge, « Baba Hammoud » réussira à donner naissance au Mouloudia qu’il ne délaissera point que le jour où il rejoindra l’éternel. Trop jeune mais assez mature pour expliquer aux colonisateurs sa profonde pensée. Un jour, vexé un commentaire déplacé d’un groupe de militaires qui s’écriaient à la vue de bambins qui courraient derrière un ballon de fortune devant la Place du Cheval, aujourd’hui place des Martyrs, où était érigée la statue du Duc d’Orléans, en lançant « Parc des Princes des ARABES », le jeune Abderrahmane, tenace, conservera « ces paroles(qui) me poursuivaient comme une ombre. Le soir même je me suis mis en quête de mes amis a qui je suggérai l’idée qui gagna et enthousiasma vite notre communauté. L’étincelle qui prit naissance Place des Martyrs embrasa la Casbah. Il ne restait plus qu’a passer à l’action.», se remémorait-il encore dans un reportage consacré à l’épopée du MCA diffusé par la télévision publique. Face aux questions de Rabah Saadallah, Abderrahmane Aouf ne ménage pas sa mémoire. « Pourquoi VERT et ROUGE ? me demande-t-on. Je répondis sur une note poétique : VERT comme le Paradis. ROUGE comme le sang généreux. », répliquera le dirigeant Mouloudéen.

Puis, pour clore son « chapelet » de réponses fuyantes envers les colons, il aura cette ingénieuse réplique envers des jeunes musulmans qui se bagarraient autour d’une partie de football. « Au lieu de nous entretuer entre algériens, pourquoi ne pas créer une équipe où nous pourrons mettre en valeur nos capacités ?. ». Le MCA venait vraiment de voir le jour…

Aouf, qui a perdu sa mère alors qu’il avait juste deux ans, sera élevé par sa tante. Son enfance fut une longue partie de football dans la rue. C’était son école à lui, et à tous ces indigènes privés d’école. A 12 ans, il saura déjà comment gagner quelques sous en allant sentir l’odeur des cigarettes dans une fabrique de tabac réputée à Alger. Un signe de destin pour celui qui n’a pas connu sa mère mais qui aura été comme une maman-poule pour « son » Mouloudia avec qui il vivra « le meilleur et le pire ».

On l’appelait « si Abdelkader » !

Abdelkader Drif, disparu il y’a juste six mois à l’âge de 86 ans, est un monstre sacré de l’histoire du Doyen. Pour le commun des mortels, surtout parmi les Mouloudéens, le sacre africain de 1976, c’est un peu (beaucoup) grâce à lui. Il symbolisait le dirigeant bénévole, militant engagé et homme de conviction qui a traversé les époques sans coup férir. Il était toujours là quand « son » Mouloudia se plaignait des coups bas. avaient besoin de lui. C’est durant les années 1970 que le natif de Tissemsilt a rejoint le comité directeur du MC Alger. Pas un simple ralliement pour cet homme qui délaissera ses affaires pour venir au chevet d’un club qui avait grand besoin d’aide pour faire pousser son projet. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le Mouloudia d’Alger se construisait son beau palmarès alors que le frère cadet de la Moudjahida qu’était Zohra Drif rejoignait la direction du club.

Pendant la réforme (1977-1993) il était toujours là à protéger le MCA contre les tentatives de noyautage. Avec d’autres dirigeants,il a milité pour que le Mouloudia récupère son sigle. Lorsque la Sonatrach a récupéré la main à l’Association Al-Mouloudia, il aura quelques propos qui resteront dans les annales. « Le protocole de 2001 a donné lieu à la naissance d’un monstre bicéphale, Mouloudia pour les uns, et El-Mouloudia pour les autres. Mais comme le surnaturel n’existe pas et comme il y a une fin à tout, il est mort prématuré à 7 ans. », déclarait-il à Liberté.

Il n’épargnera personne de ses critiques limées. Même son grand ami, Rachid Marif qu’il accusera d’être derrière la manœuvre tendant à enfoncer le Doyen. « Je me souviens d’un temps d’un pain partagé, accompagné d’un bon thé où il me disait : Abdelkader mon frère, nous sommes les gardiens du temple. Le temple est aujourd’hui toujours là, mais en ruine. Un de ses gardiens, un président qui a contribué à l’écriture de l’une des plus belles pages de l’histoire du club a disparu, à savoir votre serviteur. », soupirait-il.

Déjà à l’époque, Drif sentait le coup de ses sociétés sportives par actions que la FAF a mis en place pour donner du crédit au professionnalisme.

« La terminaison SPA sonne bien à l’oreille. Pour ceux qui ne le savent pas, dans certains pays, elle s’identifie à la société de la protection des animaux. On amuse la galerie, c’est évident. Le Mouloudia, faut-il le préciser, est depuis 30 ans en SPA. Commencez d’abord par gérer ce qui existe. Montrez-vous compétents ! Est-ce un acte de gestion que de signer des chèques qui terminent dans les tribunaux, devant la justice ? ». Drif était-il à ce point visionnaire de ce que le MCA qui fête ce 7 août 2023 son 102è anniversaire allait devenir ce géant aux pieds d’argile ?

Certainement que les prémisses d’une telle cavalcade dangereuse ne laissaient pas place au doute à celui qui n’allait pas se dessaisir de son rôle de « gardien de temple ».

Lors de sa dernière intervention publique dans la chaine El-Heddaf TV, feu Abdelkader Drif exprimait toute la différence entre les dirigeants d’antan et ceux d’aujourd’hui. « «Je ne suis pas le meilleur président dans l’histoire du Mouloudia. », tenait-il d’abord à préciser. « Il y a d’autres dirigeants qui ont apporté beaucoup au club et au football algérien. La seule différence entre la gestion de l’époque et maintenant, c’est la crédibilité. Je disais que les joueurs étaient mes enfants et que j’avais le devoir de les éduquer», ajoutait Drif dont la disparition en février dernier a fait craindre les pires lendemains aux Mouloudéens…

« Julio », l’amertume !

« Je suis triste de voir le club dans cette situation », dixit l’emblématique capitaine du MC Alger durant les années 1970-80.

« Julio » pour le commun des Mouloudéens, tellement beau et vrai élégant et souriant ne parle plus football. Sa colère est telle qu’il ne veut plus entendre parler de son Mouloudia, là où il a passé le plus clair de sa vie. Jeune comme joueur pétri de qualités, pour un défenseur au gabarit impressionnant, Abdelwahab Zenir a poussé un cri de colère puis s’est tu.

Sa dernière déclaration a eu lieu quelques jours avant le centenaire du club et dans laquelle il exprimait son chagrin.

« Je suis triste et écœuré par la situation dans laquelle se trouve le Mouloudia aujourd’hui. La gestion est très contestée, ce qui a empêché le club d’amorcer son départ, les dirigeants actuels ont failli dans leur mission, il faut dire les choses telles qu’elles sont. J’aurais aimé vivre cette célébration autrement et voir le MCA dans une meilleure situation, mais malheureusement ce n’est pas le cas », indiquait le Maestro dans un entretien à l’APS.

Bientôt 72 ans, Abdelwahab Zenir avait tout connu comme joueur du MCA. Il était l’un des hommes de base qui ont réalisé le triplé historique en 1976.

« Cela fait déjà cinq ans que le Mouloudia n’a plus remporté de titre, ce n’est pas normal pour un club comme le MCA, qui représentait par le passé un exemple à suivre en matière de stabilité et de trophées. L’équipe n’a plus d’âme, c’est regrettable qu’on puisse en arriver là. Pourtant, Sonatrach a mis beaucoup de moyens, pour rien finalement », s’insurgeait-il. Pour « El-Capitano », les changements récurrents et la mauvaise gestion sont derrière cette gabegie.

« Il n’y a qu’à voir l’amateurisme de la direction dans la gestion du dossier des festivités. Ce rendez-vous se prépare une année ou deux à l’avance, tout le monde voulait s’accaparer la célébration du centenaire, en annonçant des matchs de gala contre telle ou telle équipe. Au final, tout est reporté », faisait-il remarquer, les larmes aux yeux.

Enfant de cœur, Zenir a connu les « hommes qui ont vraiment le Mouloudia dans le sang ». Lui, c’est Braham Derriche qui l’a marqué.

« Nous étions une véritable famille unie et solidaire, deux vertus qui manquent terriblement à l’actuelle génération. Derriche, que Dieu ait son âme, était un père spirituel pour moi, il m’avait beaucoup aidé, sur et en dehors du terrain. Il nous appelait +mes fils+, un vrai dirigeant dévoué », raconte le longiligne défenseur. Il se souvient toujours, et au détail près, ce qui s’était passé après le premier trophée national remporté par le MCA en 1971 contre l’USMA au stade du Municipal du Ruisseau (actuel stade du 20-Août 55 à Alger)

« Lors du départ au stade, j’étais assis dans le bus à côté de Derriche. Soudain, il a versé une larme, je lui ai demandé : ‘Qu’est-ce que tu as ?’ Il m’a répondu : ‘rien mon fils’. J’ai insisté pour savoir, alors il m’a lancé une phrase que je ne suis pas prêt d’oublier : ‘J’ai peur de mourir et ne pas assister à ce premier titre’. Je lui avais fait savoir qu’on allait tout faire pour ne pas le décevoir. J’ai raconté ça à mes coéquipiers dans le vestiaire et ça nous a beaucoup boostés sur le terrain ».

Emouvant témoignage d’un homme qui offrit avec le reste de la bande à Ali Benfeddah le premier sacre au MCA à l’occasion de son cinquantième anniversaire.« Il y avait une génération de joueurs talentueux et soudés qui, à mon sens, ne pourra jamais être égalée. Cette finale gagnée face à l’USMA nous a complètement libérés et nous a permis d’enclencher une dynamique de victoires, jusqu’à remporter le triplé en 1976. Cette équipe véhiculait les vraies valeurs du Mouloudia », se souvient encore Zenir qui croit à la renaissance du Doyen. « Il doit y avoir une véritable restructuration pour rebâtir l’équipe sur des bases solides », conseillera celui qui a été également entraineur puis manager sportif au sein du club de ses premières amours.

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