Le football pourrait bien être à un tournant décisif de son histoire. Le 1er mars prochain, la FIFA et l’IFAB (International Football Association Board) se réuniront à Glasgow pour discuter de quatre propositions qui pourraient révolutionner les règles du jeu. Si certaines de ces idées, comme la « loi Wenger » ou l’introduction d’un chronomètre stoppable, semblent séduisantes, elles soulèvent également des questions fondamentales : jusqu’où peut-on moderniser le football sans en altérer l’essence ?
La loi Wenger : vers un football plus offensif, mais à quel prix ?
Arsène Wenger, ancien manager d’Arsenal et actuel directeur du développement du football mondial, propose une refonte radicale de la règle du hors-jeu. Selon sa vision, un joueur ne serait sanctionné que si la totalité de son corps dépasse la ligne défensive. « Vous avez parfois des hors-jeux pour quelques centimètres, de la taille d’un nez. Je pense franchement qu’il est temps de changer cette règle pour éviter de se retrouver dans des situations absurdes où un joueur est signalé hors-jeu parce que son nez dépasse. Pouvez-vous vraiment marquer avec votre nez ? Au lieu de cela, un joueur ne sera pas hors-jeu si une partie de son corps est alignée avec le dernier défenseur. Et pourtant, il peut marquer avec cette partie de son corps. Il est donc grand temps de faire évoluer cette règle », avait déclaré l’ancien entraîneur de Monaco lors des Laureus World Sports Awards en février 2020. Adieu, donc, aux hors-jeux millimétriques qui frustrent tant les attaquants et les supporters.
Cette idée, qui vise à favoriser le jeu offensif, pourrait effectivement dynamiser les matchs en augmentant le nombre de buts. Cependant, elle risque aussi de déséquilibrer les tactiques défensives, pourtant essentielles à l’ADN du football. Les défenseurs, déjà sous pression, devront redoubler de vigilance, et les équipes moins talentueuses techniquement pourraient se retrouver encore plus vulnérables.
Arbitres micro-ouverts : quand les décisions s’expliquent en direct
Le concept est simple, mais révolutionnaire : équiper les arbitres d’un micro pour qu’ils puissent expliquer leurs décisions en direct, à l’ensemble du stade et aux téléspectateurs. Inspirée du rugby, où cette pratique est déjà courante, cette mesure vise à apporter plus de transparence dans un sport où les décisions arbitrales sont souvent sources de polémiques. « Il est temps pour l’arbitrage du football de faire sa révolution, d’être transparent. La seule solution est d’avoir, comme au rugby, des arbitres avec micro ouvert, tout comme les échanges VAR », a affirmé Jean-Michel Aulas, l’ex-président de l’Olympique lyonnais, en octobre 2021. Cette idée a déjà été testée lors des Jeux Olympiques de 2024 et de la Coupe du Monde féminine 2023, avec des retours globalement positifs.
Le système Challenger : un pouvoir dangereux pour les entraîneurs ?
Inspiré du tennis, le système Challenger donnerait aux entraîneurs le droit de contester certaines décisions arbitrales en utilisant la VAR (Video Assistant Referee). Chaque coach disposerait d’un nombre limité de recours, ajoutant ainsi une dimension tactique inédite au jeu.
Cependant, cette innovation n’est pas sans risques. D’abord, elle pourrait ralentir le rythme des matchs, déjà critiqué à cause des longues interruptions liées à la VAR. Ensuite, elle pourrait augmenter les tensions entre entraîneurs et arbitres, transformant chaque contestation en bataille d’ego.
Chronomètre stoppable : la fin des pertes de temps… et du suspense ?
L’une des propositions les plus radicales est l’introduction d’un chronomètre stoppable, comme au rugby. L’idée est simple : en arrêtant le temps lors des interruptions (blessures, temps morts, etc.), on garantit un temps de jeu effectif plus long et on limite les pertes de temps, souvent critiquées. Cependant, cette mesure pourrait aussi tuer une part du suspense qui fait le charme du football.
Le dilemme de la FIFA : moderniser sans dénaturer
Ces quatre propositions illustrent le dilemme auquel fait face la FIFA : comment moderniser le football pour le rendre plus attractif, sans sacrifier ce qui en fait son essence ? Le 1er mars, les décisions prises à Glasgow pourraient marquer un tournant historique. Entre innovation et tradition, l’équilibre est fragile.
