L’attaquant international camerounais de l’USM Alger a accordé un entretien exclusif à Africa Foot United. Le Lion indomptable Leonel Ateba (25 ans) est notamment revenu sur son parcours professionnel, la CAN 2024 avec le Cameroun, les relations entre algériens et camerounais, son adaptation au football algérien mais aussi ses ambitions avec l’USM Alger.
Il a été rencontré au Cameroun où il passe actuellement ses vacances, avant son retour à Alger ce week-end.
AFU: Comment se porte Leonel Ateba ?
Ateba: « Je me porte bien, parce que je suis en santé, je suis avec la famille et je profite des vacances »
AFU : Votre parcours récent au Cameroun est assez élogieux: meilleur buteur de PWD de Bamenda en 2023, meilleur buteur de la Dynamo de Douala en mi saison 2024: Est-ce que Leonel Ateba se considère désormais comme un attaquant au dessus du championnat Camerounais ?
Ateba: « au-dessus du championnat camerounais ? C’est vous qui le dites. Pour moi c’est juste le fruit d’un dur labeur, parce que j’étais à ma cinquième année de premier division au Cameroun, je pense que c’est un travail qui a été fait depuis une certaine base, et que c’est le fruit de ce travail là, cette envie de réussir, cette envie d’être le meilleur qui fait de moi aujourd’hui ce que je suis. Mais quant-à dire que je suis au dessus du championnat camerounais, je vous laisse le faire à ma place »
AFU: En 2023, alorsque vous étiez meilleur joueur de PWD de Bamenda ayant qualifié l’équipe pour la finale de la Coupe du Cameroun, vous décidez quand même de quitter le Club pour rejoindre la Dynamo de Douala nouvellement promue en première division. Parlez nous de ce choix qui peut sembler curieux à première vue
Ateba : « Cela peut être curieux pour ceux qui ne peuvent pas comprendre, mais pas pour quelqu’un comme moi qui sait exactement comment est le football camerounais. Il est nécessaire pour tout bon joueur d’évoluer là où il va être vu. Si vous marquez 10 buts à Bamenda, ce n’est pas pareil que si marquez 10 buts à Douala. J’ai fait tous ces calculs et je me suis dit qu’avec le niveau que j’avais atteint, je pouvais aller titiller les plus grands attaquants du football camerounais, et il fallait le faire là où il y a de la visibilité. C’est entre autres raisons ayant motivé mon choix de rejoindre la Dynamo, car cela m’apportait plus de visibilité. »
AFU: A la Dynamo vous arrivez dans un effectif pléthorique avec beaucoup de concurrence. Comment Ateba s’est-il imposé comme attaquant numéro 1 ? Est-il arrivé au club avec la promesse de ce statut de cadre ?
Ateba: « Il n’y avait aucune promesse. Ça a été un processus, et durant ce processus il fallait donner le meilleur de moi-même, être concentré et discipliné. Quand vous donnez au football, il vous le rend. Je suis arrivé à la Dynamo avec l’esprit de compétiteur, avec pour objectif d’être à la hauteur de la concurrence. Si vous êtes un joueur et que vous n’aimez pas la concurrence, vous n’allez jamais évoluer. C’est dans la difficulté qu’on apprend. Être dans un univers concurrentiel avec de grands attaquants comme Kemadjou, le grand frère Fotso, m’a permis de ressortir le meilleur de moi-même »
AFU: On sentait beaucoup de complicité dans le jeu avec Julien Momasso, parlez nous de cette connexion technique qui a fait du mal à beaucoup de défenses
Ateba: « Avec Julien Momasso c’était très facile, parce que c’est quelqu’un qui a beaucoup d’expérience, qui a du talent, et qui comprend le jeu. Et c’était facile avec lui parce qu’on n’avait pas besoin de se parler pour se comprendre. Chacun savait exactement ce qu’il avait à faire. Cette complicité est venue naturellement, et c’est ce qui faisait la force de ce duo qui a fait beaucoup de mal à plusieurs défenses de notre championnat. »
AFU: Quel a été le rôle de clément Arroga dans votre passage à la Dynamo ?
Ateba : « Avec le Coach Arroga, ça a été un grand coup du destin, avec un peu de chance aussi. Alors qu’il était à Bamboutos et moi à PWD, il m’avait contacté pour le rejoindre. Mais cela ne s’était pas fait parce qu’il avait dû partir de Bamboutos. Par la suite il a été contacté par la Dynamo de Douala qui m’avait déjà contacté au préalable. Du coup on s’est retrouvé à la Dynamo, par coup du destin. Après c’est quelqu’un qui a toujours cru en mes qualités, et l’interaction avec lui était facile. »
AFU: En mi saison vous êtes convoqués en sélection pour la CAN. On imagine que c’était une très bonne nouvelle pour vous, mais racontez nous un peu cette expérience avec les Lions
Ateba: « La CAN en Côte d’Ivoire c’était une très belle et grande expérience que je n’oublierai jamais. Tout joueur de football rêve représenter son pays en portant le maillot de l’équipe nationale. Je suis passé par beaucoup d’épreuves dans ma carrière pour arriver là, au milieu de ces aînés qui m’ont durant ce moment permis d’apprendre davantage. J’ai mieux compris le haut niveau, la haute compétition avec ses exigences. En un mois dans ce groupe, j’ai mieux compris le professionnalisme et la vie de groupe. Cela m’a aussi servi dans mon intégration dans mon club en Algérie. »
AFU: Vous ne disputez malheureusement aucune minute durant cette CAN en Côte d’Ivoire, était-ce une déception pour vous ?
Ateba: « Une déception ? Je ne dirais pas ainsi. C’est vrai que comme tout compétiteur, j’aurais aimé participer sur l’air de jeu, mais j’étais déjà heureux d’être là et d’apprendre en observant les autres. Le rêve d’un enfant comme moi, venant de nulle part, et se retrouvant à une CAN, c’était peut-être aussi de se voir accorder une minute, car ce serait l’accomplissement de beaucoup de choses. Après il y’a des choix à faire par le Coach, et on se doit de les respecter. J’ai néanmoins fait trois listes sur les 4 matchs disputés par l’équipe, et cela montre que j’aurais pu à tout moment rentrer sur le terrain. Cela ne s’est pas fait, mais je ne suis pas dessus, car j’ai énormément appris de cette expérience en Côte d’Ivoire. »
AFU: Après la CAN le sélectionneur Rigobert Song et son staff ont tous été débarqués. Cela vous a-t-il choqué ? Pourquoi ?
Ateba: « Choqué du départ du coach et son staff ? Non ! Non parce que nous savons tous comment fonctionne le football. Aujourd’hui vous êtes là, demain c’est quelqu’un d’autre. Nous sommes tous de passage, que ce soit en club ou en sélection. Seule l’institution demeure. Le coach Rigo a fait son temps. Il a eu de bons moments, et d’autres moments moins bons. Mais ce que je retiens c’est ce qu’il a fait de bien. Son départ marquait juste la fin de son histoire avec la sélection. Il a beaucoup donné à cette équipe. D’abord entant que joueur, puis entant que sélectionneur. Peut-être qu’il aurait pu faire mieux, mais en football on ne peut pas tout anticiper, car il y a des aléas. Je préfère donc retenir le positif, avec ce que j’ai appris de lui, ainsi que le coach Sebastien Migne et le préparateur physique. L’histoire avec eux était belle, mais je ne suis pas choqué de leur départ car chaque belle histoire a toujours une fin. »
AFU: Il se dit que vous aviez une relation particulière avec le sélectionneur, qu’en est-il réellement ?
Ateba: « C’est quelqu’un qui m’appréciait beaucoup. Il m’a pris sous son aile dès les premiers jours. Rapidement il y a une connexion qui s’est créée entre nous, du coup chaque fois qu’on terminait l’entraînement il m’appelait pour me rappeler qu’à leur époque, à la fin des entraînements eux ils prenaient les godasses des aînés pour aller nettoyer. Du coup je savais déjà ce que j’avais à faire après les entraînements. Je ramassais ses godasses et ses bas et j’allais les nettoyer, avec plaisir. Ça a créé un lien fort entre lui et moi, car il m’a pris comme un fils, et c’était connu de tout le monde, et ça me faisait du bien »
AFU: À l’issue de la CAN, Leonel Ateba n’est plus revenu en club avec la Dynamo, il avait déjà signé avec l’USM Alger: comment cela s’est-il passé ?
Ateba: « J’avais trois contacts durant la CAN, avec des écuries qui voulaient me signer. Il y avait un club en Tanzanie, le Yanga FC, un autre Égypte, Al Ahly, et l’USM d’Alger. Et vous savez dans le football ça va très vite, nous étions à une période un peu courte, le mercato s’apprêtait à fermer et là il fallait que je trouve une porte de sortie, car je ne pensais plus retourner au Cameroun. Il était temps pour moi d’aller voir ailleurs en franchissant un autre palier. Yanga FC de la Tanzanie était le premier à faire une offre, mais l’USM est venue avec une offre plus importante, et je n’ai pas hésité, car le championnat algérien c’est l’un des plus relevés en Afrique. Du coup mon choix était fait, et je me suis engagé officiellement pendant la CAN. Et je pars de là pour l’Algerie, quatre jours avant le retour au Cameroun. »
AFU: Après vous la Dynamo a littéralement sombré : comment viviez vous les difficultés de votre ancien club depuis l’Algerie ?
Ateba: « Même étant en Algérie, j’ai continué de suivre tous les matchs de la Dynamo. Le club méritait d’être champion, ça n’a pas été le cas, mais c’est le football. Après moi le club a eu des moments difficiles, mais ce n’était pas lié à mon départ, car on avait un bon groupe. C’était difficile de voir mon ancien club en difficulté, surtout pendant les Playoffs. Mais c’était juste une mauvaise période, j’espère que le club va s’en remettre. »
AFU: Il y a eu des rumeurs indiquant une plainte de Leonel Ateba contre son ancien club la Dynamo pour non versement de votre prime de signature lorsque vous veniez de PWD: qu’en est-il exactement ?
Ateba: « L’information au Cameroun est beaucoup manipulée, et chacun l’utilise à sa guise. Je n’ai jamais porté plainte à la Dynamo de Douala. Il faut qu’on soit clair là dessus, car je ne sais même pas où on porte plainte à un club de football. Une chose est cependant vraie, c’est que j’avais un contrat de deux ans pour 3 millions de FCFA avec la Dynamo. Mais le club a décidé de ne verser que la moitié parce que je n’étais pas arrivé au terme de mon contrat. Après des personnes mal intentionnées ont pris cela pour créer leur propre information. Moi j’ai échangé avec les dirigeants de la Dynamo, et on s’est entendu. Aujourd’hui je n’ai aucun problème avec la Dynamo, je souhaite d’ailleurs le meilleur à ce club, car c’est grâce à eux que je suis ce que je suis aujourd’hui. »
AFU: Les relations entre algériens et Camerounais en matière de football ne sont pas assez cordiales ces dernières années. N’avez vous pas hésité avant de valider cette destination ?
Ateba: « On se pose forcément beaucoup de questions avant de valider n’importe quelle destination. Maintenant comme vous le dites l’Algérie c’est un peu particulier, mais je n’ai pas trop hésité. Le football est universel et moi j’ai beaucoup plus pensé à ma carrière. Le championnat algérien est un très bon championnat, et en Algérie ce sont des humains et non des monstres. Et je ne devais pas les juger sur la base des préjugés. Il y a peut-être eu un peu d’hésitation, mais tous les africains aiment le football. Alors même s’il y a de petits malentendus, la passion pour ce sport prend toujours le dessus »
AFU: Et sur place en Algérie, ressentez vous une animosité particulière vis-à-vis des camerounais ?
Ateba: « Ce qu’il faut déjà savoir c’est que le peuple algérien aime beaucoup de football. Ce sont des passionnés de ce sport, et ils savent supporter leurs équipes. Je n’ai pas vécu une animosité particulière, mais je ressens plutôt beaucoup de respect de leur part. Ils savent que le Cameroun est une terre de football, et que quand on vient du Cameroun, c’est qu’on connaît le football. À mon arrivée, j’ai été très bien accueilli que ce soit dans le groupe où dans la rue. Après, mes performances sur le terrain ont aussi contribué à rehausser l’amour qu’ils ont pour moi. Les gens ont des appréhensions négatives sur les algériens, c’est un peuple très aimable et accueillant. Après il est clair qu’ils ont une forte fierté, ils aiment leur pays, mais on ne va pas le leur reprocher. »
AFU: Vous avez terminé la saison comme meilleur passeur (8 passes D.) de l’USM Alger, est-ce un nouveau rôle pour vous ou alors vous avez dû vous adapter au groupe ?
Ateba: « Un nouveau rôle? Non ! Car je pense que pour un attaquant, l’important c’est de marquer ou de faire marquer. Moi j’ai trouvé un groupe qui avait déjà une base et un fond de jeu, il fallait que je m’adapte. Grâce à mes qualités, le coach a trouvé que je pouvais faire partie de ses plans, et il a préféré que ce soit sur un côté et non à la pointe de l’attaque. Je suis un attaquant qui aime faire le jeu, comme Karim Benzema, donc ça ne me dérange pas de jouer sur le côté. Le coach avait besoin de joueurs qui vont vite sur les côtés et aptes à éliminer en un contre un, et cela correspondait à mes qualités. Et le coach s’est appuyé là dessus, et ça a porté ses fruits. D’ailleurs je remercie le coach Juan Carlos Guerredo qui m’a beaucoup aidé dans ce processus d’adaptation. Il m’a permis de très vite rentrer dans le bain dans ce championnat très relevé. Après quand tu es professionnel, tu dois pouvoir t’adapter, et c’est ce que j’ai fait. »
AFU: Quels sont vos objectifs la saison prochaine avec l’USM Alger ?
Ateba: « Déjà il faudrait que je sois en bonne santé pour pouvoir bien me préparer pour la nouvelle saison. C’est un préalable. Après je pense que pour quelqu’un qui rêve grand et qui veut aller loin, il serait bien pour moi de finir meilleur buteur du championnat algérien, parce qu’il y a de la place pour cela. Cela me permettra pourquoi pas de revenir en sélection, et de franchir de nouveaux paliers en allant plus haut que l’USM Alger. Si avant cela, collectivement l’équipe gagne, ce serait une très bonne chose. Je veux tout gagner avec l’USM Alger. Mais tout cela dépend aussi de la grâce de Dieu. »
AFU: Nous on vous souhaite le meilleur pour la suite, et vous disons infiniment Merci, Leonel Ateba
Ateba: « Merci à vous ! »