Le Cameroun et la Côte d’Ivoire entretiennent depuis plusieurs décennies une forte rivalité qui au file des années, a viré en phobie généralisée pour les ivoiriens. Cette phobie est encore plus perceptibles actuellement, à l’aube de la 34e édition de la Coupe d’Afrique des Nations qu’abrite la Côte d’Ivoire: immersion au coeur d’une rivalité sportive aux allures fratricides.
Trivialement appelés « Le Continent », les camerounais ont réussi à se créer une réputation de personnes dotées d’un mental d’acier. Même quand on les croient « morts », les habitants du « Continent » trouvent toujours les ressources nécessaires pour surprendre tout le monde et se maintenir à flot. Ce mental d’acier, conjugué à une témérité et une confiance en soi à nulle autre pareille, a doté les camerounais d’une sorte de dominance qui fait d’eux aujourd’hui encore, un peuple très craint, surtout par les ivoiriens.
Une forte rivalité sportive et sociale à l’aube de la CAN !
Cela ne fait aucun doute, les camerounais sont très attendus en Côte d’Ivoire. Depuis plusieurs mois déjà, les clashs entre internautes sur les réseaux sociaux annonçaient les couleurs, prédisposant les camerounais à une sorte « d’hostilité passionnelle » des ivoiriens. Déjà dans les aéroports, avoir le maillot ou un autre gadget du Cameroun était la garantie d’être regardé différemment des autres. « Le continent est là » pouvait-on entendre ça et là. D’un air très souvent craintif et respectueux, les ivoiriens avaient toujours de petits mots à dire à leurs homologues camerounais. Même dans les rues des différents quartiers, le traitement est le même pour les ressortissants du « continent camerounais ». Il y a de la crainte c’est certain, peut-être liée aux multiples blessures du passé, infligée par « le Continent ».
1984… la première couleuvre !
C’est certainement de là qu’est parti « le Macabo »(entendez la rage viscérale) des ivoiriens vis à vis des camerounais. À l’époque dirigé par « le bâtisseur » Félix Houphouët-Boigny, le pays abrite la toute première CAN de son histoire, et nourrit l’ambition de remporter le titre. À l’époque seule huit équipes participent à la compétition. La Côte d’Ivoire pays organisateur, est logée dans la poule A en compagnie de l’Égypte du Togo et du Cameroun. Après avoir bien démarré avec une victoire facile 3-0 face au Togo, les ivoiriens vont enchaîner deux défaites face à l’Égypte (2-1) et face au Cameroun (2-0) sur des buts de Roger Milla et Bonaventure Ndjonkep. Celle face aux camerounais au dernier match fait davantage mal, car elle scelle définitivement l’élimination du pays organisateur.
Par la suite, le Cameroun sera sacré champion en s’imposant en finale 3-1 face au Nigeria au stade Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan. Un sacre camerounais qui sera un marqueur important de cette rage tenace des ivoiriens envers les camerounais. Véritable couleuvre toujours pas avalée 40 ans plus tard, cette victoire camerounaise et terre ivoirienne marque le début d’une longue période d’hégémonie camerounaise (avec Égypte) sur l’ensemble du continent africain. Elle hante les ivoiriens qui même inconsciemment, ont une perception particulière des équipes camerounais, empreinte à la fois de crainte, de respect d’amour et de haine.
2021… les adieux au Qatar !
C’est l’année du dernier châtiment camerounais sur la Côte d’Ivoire. On joue les éliminatoires de la Coupe du monde Qatar 2022. Après une victoire 2-1 en septembre à Ebimpé, les ivoiriens doivent valider leur ticket pour les barrages. Il faut pour cela, ne pas perdre au Cameroun. Plutôt sereins avec une constellation de stars à l’instar de Pépé, Kessié, Sangaré ou encore Gradel, les ivoiriens vont dominer les premiers instants. C’était cependant sans compter sur la résilience camerounaise qui a guidé Karl Toko-Ekambi vers l’unique but de la rencontre à la 21e minute.
La Côte d’Ivoire a enchaîné de grosses occasions, sans jamais réussir à tromper André Onana. L’on se souvient encore du tir à bout portant de Kessié à la 33e minute, repoussé en corner par Onana. Toutes les occasions ivoiriennes étaient vouées à l’échec ce jour: la victoire avait choisi son camp. À la fin de la rencontre, les Lions Indomptables avaient décroché leur billet pour les barrages de la coupe du monde et s’y étaient finalement qualifiés face à l’Algérie à Blida en Mars 2022. Cet épisode n’a lui aussi visiblement jamais été digéré par les ivoiriens.
Une crainte légitime ?
Après avoir traversé des épisodes aussi tragiques face au même adversaire, difficile de ne pas en traîner les stigmates sur la durée. Comme traumatisés, les ivoiriens sont toujours en transe à l’idée de devoir éventuellement se frotter aux Camerounais en football : le spectre des événements de 84 et 2021 est dans un coin de la tête. Aux épisodes de 1984 et 2021, l’on pourrait ajouter d’autres nombreuses déconvenues ivoiriennes en compétition officielle face au Cameroun, mais aussi le fait de voir l’un des camerounais les plus illustres de l’histoire, Samuel Eto’o, épouser une ressortissante de la Côte d’Ivoire. Tous ces éléments juxtaposés, font du Cameroun une véritable bête noire pour les ivoiriens.