La conférence de presse d’après-match de Gernot Rohr a laissé un goût amer. Alors que le Bénin sort d’une défaite préoccupante, le sélectionneur franco-allemand a encore une fois choisi de dézinguer ouvertement certains joueurs, relançant le débat sur sa gestion humaine et sa communication.
Interrogé sur l’absence de Jordan Lawson et Adam Akimey, deux jeunes éléments convoqués pour l’amical, Rohr a livré une réponse jugée condescendante et contre-productive. « C’était pas un match pour eux, je pense. Lawson est un peu jeune, on le savait que c’était pour apprendre, pour regarder. Il sera plutôt fait pour les U20 que pour nous. Akimey, on l’a vu à l’entraînement. Il y a encore du travail, il n’a que 21 ans. Je ne vois pas encore la qualité qu’il peut nous apporter un plus. Je pense que le retour de Steve Mounié va vraiment être indispensable pour l’équipe », a-t-il lâché.
Une communication qui fragilise plutôt qu’elle ne protège
Une nouvelle fois, Gernot Rohr expose publiquement des joueurs au lieu de les protéger. Cette méthode, déjà critiquée par le passé, pose la question de sa capacité à gérer un effectif jeune, en construction, et en quête de repères. En quelques phrases, Rohr minimise le potentiel de Lawson, réduit à un rôle d’observateur ; décrédibilise Akimey, jugé incapable d’apporter quoi que ce soit à la sélection ; et renvoie implicitement la responsabilité des problèmes offensifs à l’absence de Steve Mounié. Pour une équipe nationale qui cherche à bâtir l’avenir et à valoriser de nouveaux talents, le message a de quoi inquiéter.
Un précédent qui agace : le cas Rodrigue Fassinou
Ce type de sortie n’est pas nouveau. Il y a quelques mois, c’est Rodrigue Fassinou qui avait été livré en pâture. Rohr avait déclaré sans filtre que le joueur « n’était pas bon », provoquant l’indignation des supporters et même de certains techniciens locaux. Accumuler ainsi les jugements à l’emporte-pièce sur ses propres joueurs mine la cohésion du groupe et affaiblit l’image de la sélection. Au lieu de renforcer la motivation des jeunes, ces propos risquent de créer frustration, perte de confiance et démobilisation. Le rôle d’un sélectionneur n’est pas seulement d’établir une tactique ; c’est aussi de construire un environnement où chaque joueur peut progresser, même lorsqu’il n’est pas encore prêt à être titulaire.
Une stratégie de communication à rebours des standards
Qu’un entraîneur estime qu’un joueur n’est pas prêt est une réalité du football. Mais l’exprimer ainsi devant les médias, sans nuance, sans encouragement, sans perspective de progression, relève d’une erreur stratégique évidente. À l’heure où de nombreux sélectionneurs africains valorisent leurs jeunes, les accompagnent et misent sur eux même dans les moments difficiles, Rohr semble faire le choix inverse : distancer, exclure et étiqueter trop vite.
Cette communication abrasive expose inutilement les joueurs ; alimente les tensions internes ; place le staff dans une position défensive ; et donne au public l’impression d’un entraîneur qui cherche des excuses plutôt que des solutions.
Le Bénin peut-il avancer avec ce type de leadership ?
Alors que la sélection cherche à se reconstruire et à installer une nouvelle génération, la répétition de ces sorties pose une question centrale :
Gernot Rohr est-il encore capable d’incarner une dynamique positive autour des Guépards ? En dévalorisant publiquement les jeunes joueurs, il sape à la fois la confiance de ceux-ci et la crédibilité du projet sportif. À un moment où chaque minute de jeu, chaque encouragement, chaque geste de soutien peut compter, l’équipe nationale a besoin d’un manager fédérateur, pas d’un communicateur maladroit.
Si les résultats sportifs sont décevants, l’ambiance autour de l’équipe ne l’est pas moins. Et à ce rythme, Rohr risque d’accumuler plus de fractures que de victoires.






