L'incontournable du football africain
L'incontournable du football africain

Infantino aime-t-il vraiment la savane ?

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Infantino plébiscité à Kigali, c’est encore une fois l’Afrique qui courbe l’échine. La CAF et les représentants du football continental ont fait allégeance corps et âme à l’Italo-suisse qui a promis et continue de faire des promesses aux africains. Jusqu’à quand ? 

Ahmad Ahmad, déchu président de la CAF, a lâché le morceau dans un entretien-confidences à la BBC. Le Malgache n’arrivant toujours pas à comprendre le push qui l’a mis hors circuit en mars 2021 a confessé que sa suspension est un acte politique. « Fatma (Samoura, la SG de la Fifa) nous a beaucoup aidés, mais au bout de six mois, nous avions obtenu ce que nous voulions et nous n’avons donc pas prolongé la mission, mais cela a irrité les gens de la Fifa – Gianni était en colère.

En quittant la réunion, certains membres de la Fifa ont dit à mes collègues que j’avais signé mon arrêt de mort. Qu’est-ce qu’un arrêt de mort dans le football ? C’est certainement la saisine du Comité d’Ethique, l’arme fatale qu’ils utilisaient à l’époque », a dit Ahmad pour qui la preuve que le verdict était politique est que le TAS de Lausanne avait réduit sa peine de plus de la moitié (2 au lieu de 5 ans comme décidé par la Commission d’Ethique de la Fifa).  

« Cela prouve que les erreurs dont je suis accusé étaient sujettes à interprétation », pense Ahmad Ahmad qui avoue avoir été déçu par les présidents des fédérations nationales africaines. Le seul à avoir clairement soutenu que la Fifa exerce une forme de « colonialisme » sur l’Afrique était le président de la fédération bissau-guinéenne, Manuel Nascimento qui affirmait à la BBC World que « la CAF appartenait à l’Afrique et que l’accord ne serait accepté dans aucune confédération au monde – alors pourquoi devrions-nous le faire ? ». 

Une déclaration qui a eu pour conséquence sa suspension immédiate par la Commission d’Ethique de la Fifa qui l’a banni pour avoir participé à… « un incident de justice populaire » dans son pays où il a été, pourtant, innocenté par un juge de Bissau. 

Un push inspiré par le Maroc 

Ahmad Ahmad qui semblait avoir haut-le-cœur désignait fatalement le bourreau de Nascimento qui n’était autre que le SG de la CAF de l’époque, un certain Mouad Hajji, marocain de son état qui agissait aux ordres de son compatriote Faouzi Lekdjaâ. 

En tout cas, toute voix hostile au projet d’Infantino était condamnée à disparaitre du paysage,  comme ce fut également le cas du libérien Musa Bility suspendu et mis à l’amende pour avoir « refusé de se soumettre aux désirs de la Fifa », explique Ahmad. 

Celui-ci reconnait explicitement le rôle des marocains dans son élection face à Issa Hayatou, en 2017.  

Bien sûr sous l’autorité de Gianni Infantino. « Gianni voulait un candidat pour éliminer Hayatou – tout le monde le savait. Gianni m’a convaincu de le faire », confesse-t-il. Plus besoin d’aller loin dans le réquisitoire, Ahmad s’est pris à son propre jeu et veut certainement régler de vieux comptes à quelqu’un, Patrice Motsepe, qui n’est en définitive qu’un prolongement de la comédie tragi-comique écrite par Gianni Infantino. 

Le valaisan, et c’est vérifié, en connait les chapitres de toute l’histoire car, lui-même en a trempé dans de mielleuses affaires et est poursuivi par la justice de son pays notamment pour «incitation à l’abus d’autorité, à la violation du secret de fonction et à l’entrave à l’action pénale ».  

Tout le panel d’un criminel qu’Infantino tente de faire oublier mais que les récentes révélations des médias helvétiques portant sur une opération d’espionnage menée par les services secrets du Qatar, où il séjourne en famille depuis quelque temps, à propos des rencontres secrètes qu’aurait eu le patron de la Fifa avec le magistrat Michael Lauber.  

En 2015, le parquet suisse avait chargé l’ex-Procureur général d’enquêter sur une affaire impliquant des responsables de l’instance internationale de football, dont le siège est à Zurich, dans sa « gestion déloyale, blanchiment d’argent par le biais de relations bancaires en Suisse », le fameux Qatargate qui a mis en émoi toute le planète sans que personne parmi les vrais « acteurs » ne soit inquiété. Certes, Blatter a été trainé dans la boue mais tout le reste de son staff dont Gianni Infantino n’était pas inquiété. 

Et rappeler à Infantino cette « tranche de l’histoire » alors qu’il venait d’être plébiscité par les membres de l’AG de la Fifa, à l’exception de l’Allemagne qui était la seule à s’exprimer publiquement en assurant qu’elle ne voterait pas au profit d’Infantino, relève de la provocation. 

Lors de sa conférence de presse suivant le vote par acclamations, le président de la fédération internationale a fait état de sa colère face à ces journalistes qui fouinaient dans ces « petites » histoires. « Je ne comprends pourquoi certains journalistes sont si méchants. Peut-être que je ne parle pas assez aux journalistes. Peut-être que vous n’avez pas assez de fuites », a-t-il lancé à l’endroit des médias présents. 

Dans sa noire colère, en dépit de l’euphorie ambiante qui s’est emparée du Palace où s’est tenu le Congrès électif, Infantino fera une comparaison psychédélique avec le… génocide rwandais. « Je n’ai jamais abandonné », a-t-il argué pour dire qu’il a réussi à redresser la situation de la Fifa comme a réussi son ami le président Paul Kagame à faire du Rwanda ce qu’il est actuellement. Pour dire en fait qu’il ne se fixe aucune limite, lui l’artisan de ces projets qui bonifieront les caisses de la Fifa par 7.  

D’ailleurs, il faut bien noter que parmi les premières personnalités à le féliciter nous trouvons de grands hommes d’affaires à l’instar du président du TP Mazembe, Moise Katumbi très ravi d’apprendre la réélection d’Infantino dont « les réformes engagées pour rendre le football véritablement mondial constituent une réelle opportunité pour les nations, les clubs et les joueurs africains », écrit le patron des Corbeaux et surtout candidat aux élections présidentielles de la RD Congo en décembre prochain, sur twitter quelques heures après le vote. 

L’Afrique à plat ventre 

Comme pour Motsepe, Katumbi a compris que le football est le meilleur chemin pour gagner le cœur des électeurs. Soutenir Infantino qui fera la « campagne » pour servir les lobbies n’est plus un secret de polichinelle. L’Italo-suisse aime les riches qui le lui rendent bien cet amour où l’intérêt ne va que rarement au football et aux footballeurs.  

L’Afrique qui vaut 54 voix, à titre d’illustration, a voté massivement pour lui. Elle a du certainement être bluffée par les dividendes (200 millions dollars minimum) que pourrait rapporte la Super League africaine telle que conçue par Infantino. Il est pourtant illusoire que ce montant soit entièrement consacré au développement du football africain.

D’abord parce que ce n’est pas tous les clubs africains qui sont admis à concourir dans cette épreuve. Ensuite parce que la CAF a annoncé récemment que la dotation de cette épreuve lucrative est de 100 millions de dollars à répartir sur l’ensemble des participants(8 pour commencer) qui empocheront un minimum de 2,5 millions de dollars, le vainqueur touchera lui 11 millions de dollars. Des broutilles, en fin de compte pour des clubs sélectionnés à la tête du client, ceux de Lekdjaâ, Motsepe et Katumbi en première ligne. 

Or, cette cagnotte s’apparente à la petite monnaie comparativement aux prévisions émises dans le cas d’une Super League d’Europe.  

En avril 2021, la banque américaine JP Morgan a situé le montant de son apport entre 4 et 6 milliards d’euros. Malgré cette offre mirobolante, l’Europe  dit « non » à Infantino car elle savait que les enjeux sont ailleurs. 

L’artifice pécuniaire étant une carte parmi tant d’autres, Infantino sait comment attirer ses « proies » autrement que par l’argent. Le chantage le plus efficace demeure cette attirance qu’ont les peuples africains à la Coupe du monde.  

Durant sa conférence de presse, jeudi à Kigali, Infantino lancera une pique aux africains dont les équipes n’étaient pas de la fête au Qatar. « L’Italie, l’Égypte de Salah, la Suède, le Chili… Vous avez l’Algérie de Mahrez qui n’a pas réussi à se qualifier à la Coupe du monde. Peut-être qu’avec 48 équipes, elles pourront être là. », affirmait-il subtilement.

Malicieusement. C’est cette face cachée qu’Infantino ne veut pas que ses détracteurs exploitent pour le flinguer. Lui qui croit toujours qu’il a le droit de postuler pour un…troisième mandat, en considérant que le premier (2016-2018) n’en était pas véritablement un « plein ».  

Désormais, le petit dinosaure de Brigue (qui signifie forteresse de colline) qui fêtera ses 53 ans le 23 mars se projette vers 2031. Il aura seulement 61 ans, l’âge de la retraite par définition. Il aura peut être mis la Fifa hors du besoin, encore plus riche que jamais, mais qu’en sera-t-il du football ? 

Avant lui, Havelange et Blatter semblaient « meilleurs défenseurs du football » et pourtant. Le premier, mort  à 100 ans, n’a pas échappé aux critiques, l’anglais Gary Lineker disant que « le football lui a apporté beaucoup », ses 24 passés à la présidence de la Fifa ont été marquées par les soupçons de corruption tandis son successeur, qui était aussi son SG, a mis ses 17 ans de service à subir les polémiques avant d’être finalement trainé dans la farine et quittera son bureau de Zurich forcé, sur la pointe des pieds. L’histoire ne peut être qu’un éternel recommencement. 

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