Des déclarations certainement maladroites de l’ex-international Djamel Benlamri, prises au premier degré sur les joueurs nés à l’étranger et évoluant en sélection, ont tourné très vite à la polémique stérile.
Pour ceux qui le connaissent bien, notamment ses coéquipiers en sélection nationale, savent bien que Djamel-eddine Benlamri, le défenseur champion d’Afrique 2019, est un peu une sorte de grosse gueule, mais avec la main toujours sur le cœur.
Depuis quelques jours, et le 25 octobre plus précisément, il fait l’objet d’une polémique suite à des déclarations faites lors d’un live sur le réseau social TikTok où il a donné un avis sur les joueurs nés à l’étranger, ou comme on les appelle également les binationaux, qui viennent souvent composer la majorité de l’effectif de l’équipe nationale.
Une tendance qui dure depuis pratiquement deux décennies, depuis que le vivier local a commencé à avoir du mal à fournir un gros contingent de joueurs de haut niveau pour performer en sélection. Une tendance qui s’est accentuée avec la fameuse loi des Bahamas, dont l’ex-président de la fédération algérienne de football, Mohamed Raouraoua, en a fait son outil de gestion pour étoffer l’équipe nationale, notamment lors des deux dernières campagnes de Coupe du Monde de 2010 et 2014.
En 2019, lors du sacre de l’équipe nationale en Coupe d’Afrique des nations en Egypte, la moitié de l’équipe sur le terrain drivée alors par Djamel Belmadi, était composée de joueurs issus directement ou indirectement du championnat local avec les Rami Bensebaini, Djamel Benlamri, Youcef Atal, Youcef Belaïli, Islam Slimani et Baghdad Bounedjah, sans oublier Hichem Boudaoui et le deuxième gardien Azzedine Doukha.
Les échanges qu’a eu Benlamri, presqu’en privé, ont été prises au premier degré par les blablateurs de tout bord pour en faire un sujet de polémique où même le journal Le Monde s’en est emparé pour alimenter en réalité un thème désuet, dont le débat se limite à opposer les avis des uns à celui d’autres, sans vraiment aller au fond des choses.
Quelques ex-internationaux, comme Nordine Kourichi et Nacer Bouiche ou l’ancien sélectionneur national Nasser Sandjak se sont exprimés pour remettre Benlamri à l’ordre et lu faire rappeler certaines vérités déjà connues comme l’attachement des joueurs nés à l’étranger à leur pays, celui de leurs parents, leur apport sur le plan sportif et les sacrifices qu’ils ont souvent consenti pour défendre les couleurs nationales.
D’ailleurs, dans ce registre nul ne pourra oublier le but de Chérif Oudjani, le fils de son Ahmed, joueur du FC Sochaux, qui a offert le but de la victoire à l’Algérie lors de la première finale à la CAN 1990 à Alger, ou celui d’Antar Yahia, qui évoluait au VfL Bochum contre l’Egypte à Omdurman, ou bien Ryad Mahrez et son coup franc magique contre le Nigéria en 2019 propulsant les Verts en finale de la CAN.
Rien que ces trois joueurs sont issus de l’immigration et ce ne sont pas ceux-là que Benlamri visait particulièrement, mais probablement certains éléments qui, à ses yeux, n’apportaient pas le plus escompté, même si cette problématique avait été pratiquement enterrée avec le fameux S12 de Djamel Belmadi.
Ce n’est pas un hasard si tous les sélectionneurs qui se sont succédés à la tête des Verts depuis le début des années 2000 ont toujours eu recours aux joueurs professionnels évoluant à l’étranger et dont la plupart sont nés en France et formés dans les centres de formation des clubs de l’hexagone.
Le message à décoder de Benlamri s’adresse plutôt aux dirigeants du football national, aux clubs et plus particulièrement à la fédération, qui négligent depuis des lustres la formation et la prise en charge sérieuse et réelle du potentiel existant en Algérie.
C’est là aussi où Sandjak a touché du doigt la vraie problématique du football algérien, c’est lorsqu’il affirma qu’en Algérie la quasi-totalité des clubs ont délaissé cette mission pourtant fondamentale celle de la formation, alors que par le passé des générations entières étaient issues d’une vraie politique portée par des connaisseurs, des détecteurs de talents bénévoles et des formateurs de grande qualité qui ont permis à la sélection d’être composée essentiellement de joueurs locaux, et dont les apports en éléments venus de l’étranger étaient minimes.
Ce rapport s’est, depuis, inversé, et la fédération s’est complètement retournée vers les joueurs binationaux, y compris chez les jeunes catégories dans le but de rivaliser avec les autres nations du continent qui ont pris de l’avance dans ce domaine.
La récente décision de la FAF de priver les joueurs du championnat national de se frotter avec leurs homologues du continent lors du prochain CHAN 2025 est la parfaite démonstration que la fédération a tout faux.
En réalité, ce ne sont pas les paroles de Benlamri qui sont scandaleuses, qui n’ont d’ailleurs pas fait réagir ses coéquipiers, mais ce sont ces décisions irréfléchies et cette absence de vision d’avenir qui font le plus mal au football algérien et à son avenir.