Le CHAN ne sera jamais réédité, la 7è édition organisée en Algérie pourrait s’avérer la dernière d’une courte série entamée quatorze ans plus tôt en Côte d’Ivoire.
La CAF, qui réfléchit à une autre formule au profit des footballeurs locaux, tient par contre à donner un coup de beauté à sa principale épreuve, la CAN dont le prochain tournoi aura lieu sur la terre des Eléphants de Didier Drogba.
Mais avant, l’instance de Patrice Motsepe a beaucoup de choses à éclaircir et de contentieux à régler. Notamment cette incertitude qui plane sur le choix du pays qui abritera la 35è copie de la Coupe d’Afrique des nations en 2025, probablement à décaler en 2026 pour faire plaisir aux clubs européens.
En effet, à la veille de la finale du CHAN-2022 entre l’Algérie et le Sénégal, les membres du Comex de la Confédération africaine de football avaient tenu une réunion au niveau du Centre International des Conférences Abdelatif Rahal à Alger et ont discuté nombre de questions relatives la gestion des compétitions placées sous l’égide de la CAF à l’exemple de la Super League Africaine et certainement de la CAN. Mais, le « sujet tabou » a bel et bien été abordé. D’ailleurs, jusqu’au jour d’aujourd’hui, la CAF n’a donné aucune résolution concernant cette réunion d’Alger.
Selon des indiscrétions, l’aspect financement a pris le dessus sur les débats de cette rencontre suivie attentivement par les postulants à l’organisation de la CAN-2025, l’Algérie et le Maroc en particulier.
Si les Algériens étaient restés sur leur faim, la CAF n’ayant rien communiqué officiellement à propos de la teneur de ce conclave auquel le patron de la FMRF, Fouzi Lekdjaâ, n’a pas jugé utile de participer, les marocains riaient sous cape et se frottaient les mains que Motsepe et ses pairs de la CAF eurent esquivé la question de l’attribution de la 35è édition de la CAN.
Durant sa conférence de presse, samedi à Alger, quelques heures avant la finale du Championnat d’Afrique des nations, Motsepe accompagné de son SG, le congolais Veron Mosengo-Omba, est demeuré évasif. Le président de la CAF a certes coupé court aux informations-rumeurs qui avançaient la date du 10 février comme étant celle de l’annonce du nom du pays organisateur de la CAN-2025 et a même assuré que sa structure se montrera juste et équitable envers tous les candidats. Il a aussi émis le vœu de voir les pays qui offriront les meilleures conditions aux compétiteurs et aux spectateurs triompher lors du vote.
S’il a souligné que l’Algérie « a gagné quelques points » en offrant tout le confort aux participants du CHAN, il laissera, toutefois, planer des doutes sur l’identité de l’heureux lauréat en apportant même une certaine ambigüité.
Selon différentes lectures, deux pays, l’Algérie et le Maroc, seraient favoris pour obtenir l’organisation de la CAN-2025. Motsepe ne le dit pas solennellement mais tout indique que la lutte se fera entre ces deux candidats de l’Afrique du nord.
Senghor, poker-menteur
La partie Algérienne, réchauffée par les propos élogieux de ses invités et des officiels de la Confédération africaine de football, se limitera à quelques déclarations faites par d’anciens footballeurs internationaux, des membres du COCHAN et du président de la FAF, Djahid Zefizef. Ce dernier a, dans un entretien à la télévision publique, assuré que le « dossier » algérien, qui implique 63 thématiques et associe 15 secteurs, est « sérieux et méthodique ».
M. Zefizef qui a fait état de l’émerveillement des membres du Comex/CAF quant à la qualité des infrastructures et la parfaite organisation du CHAN affirmera à grande voix que « les membres de la CAF, tellement subjugués par ce qu’ils ont vu et constaté, m’ont fait savoir qu’il n’est plus besoin d’inspecter les installations qui accueilleront le tournoi et que tout est parfait pour que l’Algérie soit l’heureux élu».
Cette confiance débordante de Djahid Zefizef, le président de la FSF (fédération sénégalaise de football), l’a traduite par une autre déclaration à la presse, au lendemain du sacre de l’équipe sénégalaise en finale du CHAN.
Accosté à l’aéroport, au moment de quitter l’Algérie pour le Sénégal, M. Augustin Senghor, qui n’est autre que le 1er vice-président de la CAF, a lâché quelques indices au sujet de la rencontre organisée par le Comex/CAF à la veille de la finale du CHAN.
« L’Algérie a montré et prouvé ses capacités d’abriter les plus grandes manifestations sportives. Ce qu’a fait l’Algérie pendant le CHAN est vraiment exceptionnel. Elle a des chances réelles de se voir attribuer l’organisation de la CAN 2025.», a-t-il dit en préambule avant de faire savoir que les inspections de la CAF se feront « plus tard » et que « l’annonce du pays organisateur se fera probablement en juillet. ».
Le premier responsable du football au Sénégal, accompagné par l’ancienne vedette des Lions de la Téranga, El-Hadji Diouf qui, lui, était dithyrambique envers « les capacités de l’Algérie à organiser une Coupe du Monde » pas seulement une CAN, semblait quelque peu gêné de ne pouvoir donner plus de précisions à propos du processus d’attribution de la CAN-2025 en laissant entendre que « si l’Algérie organise l’édition de 2025, le Maroc obtiendra la suivante et vice-versa ».
Pour lui, le président Motsepe veut donner à la CAN « une envergure mondiale, c’est pourquoi, il a mis la barre très haut concernant les standards devant prévaloir à l’organisation de ces manifestations».
Pour l’anecdote, Motsepe avait confié lors de sa dernière prestation médiatique à Alger que «la CAN qui suivra celle de 2023(reportée à 2024) prévue en Côte d’Ivoire n’aura pas lieu dans un pays de l’Afrique de l’ouest » et ce « par équité zonale ». Une manière d’écarter le dossier commun déposé par le Nigéria et le Bénin.
Ce qui sous-entend que si l’Algérie, ou le Maroc, organisera la CAN-2025, l’un des deux pays attendra 2029 pour espérer abriter le tournoi panafricain. Une logique que la CAF n’entend pas abandonner en dépit du fait que le nombre de pays de certaines zones continentales dont les capacités d’accueillir des compétitions avec les nouveaux cahiers de charges s’en trouve réduit à sa plus simple expression à moins qu’il s’agisse de co-organisation comme ce sera le cas pour le Nigéria et le Bénin qui ont postulé pour 2025 et qui peuvent se représenter en 2027 ou encore l’Ouganda, le Kenya et la Tanzanie qui ont officieusement candidaté pour la trente-sixième édition.
Une formule (la Co-organisation, ndlr) qui avait laissé un goût d’inachevé lorsque le Ghana et la Nigéria avait conjointement partagé le droit d’abriter la CAN-2000 qui, pour la petite histoire, n’a rassemblé que seize équipes. il faut juste rappeler que l’attribution du tournoi à deux pays limitrophes a été une décision exceptionnelle, le Zimbabwe désigné par la CAF n’était plus en mesure de respecter les délais pour achever les travaux et ce, en raison de la grave crise économique qui frappait ce pays de l’Afrique australe. Une zone où, tout compte, seule l’Afrique du Sud est en mesure de répondre aux conditions drastiques fixées par la CAF.
La CAF gamberge, Alger observe
De retour en Afrique du Sud au lendemain du CHAN, le président de la CAF s’est à nouveau exprimé devant la presse de son pays sur le processus d’attribution de la CAN-2025. Un processus qui avait fait de plusieurs communications avant que la CAF ne change sa « méthode » sous les pressions des pays candidats et de ses sponsors.
A Alger, Patrice Motsepe a laissé apparaitre une certaine gêne chez les membres de son Comex et ce, en raison de la « sensibilité » de la question d’attribuer ledit tournoi à l’un des pays maghrébins, en l’occurrence l’Algérie et le Maroc. Il l’était moins quand les médias sud-africains l’avaient interpellé sur la question.
Dans une déclaration au site Kick-off.SA, le patron de la CAF a mis l’accent sur la place qu’occupent les deux pays(Algérie et Maroc) dans le processus de développement du football africain.
« Nous avons besoin des deux pays dans notre processus de développement du football. Nous traiterons chaque nation avec justice et équité et aucune nation ne sera traitée différemment », a-t-il rappelé.
Pareils propos, Motsepe les a tenus à Alger lors de la conférence de presse organisée le jour de la finale du CHAN et qui ont, selon les observateurs, renvoyé dos-à-dos l’Algérie et le Maroc.
Ces mêmes observateurs craignaient quelques semaines avant le CHAN que les « jeux soient faits » pour l’attribution de la CAN « le Maroc ayant tout arrangé » depuis que la CAF a décidé de retirer l’organisation à la Guinée, estimaient-ils.
« Les quelques points gagnés par l’Algérie » suite à la parfaite organisation du CHAN seraient-ils à ce point « importants » pour obliger la CAF à revoir son choix ?
Possible. Mais, il faut juste croire que depuis que l’alerte a été donnée, comme quoi le Maroc avait déjà tout mijoté pour empêcher l’Algérie à accueillir la CAN-2025 en se l’appropriant grâce à un minutieux travail de coulisses, les plus hautes autorités en Algérie ont lancé la contre-attaque et avaient leurs pions.
Sportivement en offrant « la plus belle des copies du CHAN depuis son lancement» et sur le plan diplomatique en « sensibilisant ses alliés ».
Une image suffit pour dire l’implication de l’appareil consulaire algérien dans le processus de ralliement de plusieurs pays d’Afrique à la cause du dossier algérien. Lors de la finale du CHAN, le Président de la république était représenté par son Premier ministre Aïmen Benabderrahmane mais surtout, et c’est une première, son ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra.
Toute une symbolique du travail titanesque entrepris par les représentations diplomatiques algériennes dans les pays africains. Bien sûr, dans un tel processus, les responsables Algériens n’ont pas claironné leur démarche préférant se concentrer sur l’essentiel et éviter les futilités qu’engendrent les démonstrations publiques. Faut-il oublier l’absolu passage obligé que constituent les sponsors de la CAF ?
Partenaire incontournable du football africain, TotalEnergies a son « mot à dire ». Depuis quelques mois, ses affaires sont florissantes en Algérie…
C’est dans ce contexte qu’il faut saisir les propos de Motsepe quand il déclarait que « la CAF ne peut être mise au centre de tels enjeux politiques. Toutes les nations participations furent libres d’entrer en Algérie. Le gouvernement algérien souhaitait vivement la participation du Maroc.» et dans ce même cadre qu’il faudrait saisir la « peur bleue » qui s’est emparée des membres du Comex de la CAF de se laisser entrainer par la « méthode Lekdjaâ ».
