Le mois d’avril dernier le Ministère de la jeunesse et des sports interpellait, dans un courrier adressé à ses démembrements, sur le respect de la réglementation en matière de cumul des fonctions. Mais la FAF a fait le contraire, en renforçant son équipe de ‘’cumulards’’.
Le directeur général des sports du Ministère de la jeunesse et des sports (MJS), Mustapha Ali Hassani, avait saisi le 7 avril 2024 toutes les directions de la jeunesse, des sports et des loisirs (DJSL) des wilayas, les interpellant à veiller sur le strict respect des textes, notamment le décret exécutif n°15-340 du 28 décembre 2015 modifié et complété par le décret exécutif n°60-21 du 8 février 2021 relatif au non cumul entre la responsabilité élective et exécutive et la responsabilité administrative au sein des structures d’organisation et d’animation sportives.
La Direction générale des sports (DGS) avait donné la date butoir du 14 avril 2024 pour justement faire le point concernant : le nombre de cas recensés sur la période du mandat olympique 2021-2024 ; le nombre de cas solutionnés (assainis) et enfin le nombre de cas toujours en suspens, en fournissant les détails nécessaires (structures concernées, les noms des cumulards, les fonctions cumulées, …).
Depuis, le MJS n’a plus communiqué à ce sujet, surtout qu’à l’échelle des fédérations les cas de transgressions des textes de loi n’ont jamais atteint un seuil aussi important et inquiétant que durant cette année 2024, celle de la fin de mandat olympique pour toutes les structures relevant du secteur de la jeunesse et des sports.
A titre illustratif, et selon un membre de l’Assemblée populaire nationale (APN), le Ministre Abderrahmane Hammad aurait accordé plus de 250 dérogations pour permettre à des candidats ne répondant pas aux critères d’éligibilité, notamment en matière de niveau d’instruction conformément aux décrets exécutifs n°22-309 et n°22-310 du 12 septembre 2022, d’être élus ou réélus au sein des associations, clubs et ligues.
Dans ce contexte marqué par les passe-droits, le non-respect des textes et l’impunité, la fédération algérienne de football en est la parfaite illustration. Non seulement, c’est la seule fédération sportive qui ne s’est pas mise en conformité avec les textes de la République et les Statuts de la FIFA, mais elle excelle en renforçant son ‘’illégalité’’.
En effet, en plus de Lahcène Tombouktou (Président de la Ligue de football de la wilaya de Tamanrasset et Président de la Commission Coupe d’Algérie), Ahmed Kharchi (Président de la Ligue de football de la wilaya de Laghouat réélu et chargé de la gestion de la Ligue nationale de football amateur, LNFA), Rachid El Jakani (Président de la Ligue de football de la wilaya de Béchar réélu et Président de la Commission de coordination des ligues), et Ali Melik (Président de la Ligue de football de la wilaya d’Illizi réélu) qui sont concernées par le cumul de fonctions et devront impérativement procéder à la régularisation de leurs situations respectives, d’autres membres du bureau fédéral sont venus s’ajouter à cette liste.
Il s’agit d’Abdelkader Boutaïba, nouvellement élu à la Ligue de football de la wilaya d’Oran, chargé de la commission Beach-Soccer, et Djamil Ould Amar qui prend la Ligue de football de la wilaya d’Alger, en remplacement de Rachid Oukali, et chargé de la commission finances de la FAF. Même Mohamed Amine Mesloug, est candidat pour la Ligue de football professionnel (LFP), soit la cerise sur le gâteau de la transgression.
Ils sont donc six membres cumulards au sein du BF au su et au vu de tout le monde, sans qu’aucune autorité ne vienne interpeller la fédération dont ces mêmes membres sont censés être signataires d’un engagement avant leur élection (valable un mois) pour faire le choix entre un siège au bureau fédéral et la présidence de la ligue.
Une application de la loi à deux vitesses
Ce n’est pas la première que la FAF soit confrontée à une telle situation. Avant cela, l’ex-ministre de la jeunesse et des sports, Abderrazak Sebgag avait fixé la date du 30 septembre 2021 au bureau fédéral présidé par Amara Charaf-eddine comme délai pour se conformer à la réglementation. Le ministre menacera même les présidents de fédérations et les directeurs de la jeunesse et des sports de sanctions ou de mise à l’écart si ces derniers ne se soumettaient pas à l’application de la Loi.
A l’époque, la fédération avait fait la sourde oreille jusqu’à la démission de son président et la dissolution de son bureau fédéral qui comprenait au moins quatre membres cumulards.
Le même cas s’est reposé par la suite durant le court mandat de Djahid Zefizef, où certains médias en avaient fait leur cheval de bataille pour peser sur l’ex-président de la FAF et le MJS à faire respecter la réglementation. Ce qui n’est plus apparemment le cas aujourd’hui. D’ailleurs, face à cette levée de bouclier quatre (04) membres sur treize (13) ont dû se résigner et rejoindre leur ancien statut (Ligue ou club).
Il s’agissait d’Abdelhafid Fergani (Président de la Ligue de football de la wilaya de Blida), Mohamed Ghouti (Président de la Ligue de football de la wilaya d’Oum El-Bouaghi), Touati Derdour (Président de la Ligue de football de la wilaya de Mostaganem) et enfin Azzedine Benacer (Président du club de la Ligue 1, le NC Magra).
Avec le retrait de ces quatre membres, le bureau fédéral est passé à neuf (09) membres puis à dix (10) avec l’intégration d’un membre élu suppléant en la personne de Houcem-eddine Harkat en application de l’article 33 alinéa 4 des statuts de la FAF ; alors qu’un autre cumulard, Karim Chetouf, alors président du CSA/CR Belouizdad n’a curieusement pas été inquiété puisqu’il a continué à siéger au sein dudit BF.
Le prochain ministre parviendra-t-il à faire appliquer les textes de Loi ?
Avec six membres cumulards, le bureau fédéral de Walid Sadi, a fait ‘’pire’’ que son prédécesseur avec la complicité du MJS. D’aucuns s’interrogent si le prochain ministre de la jeunesse et des sports, issu du très attendu remaniement ministériel parviendra-t-il à faire plier la FAF l’intimant à se conformer à la réglementation ou bien que cette instance demeure une structure hors-norme et au-dessus des Lois de la république ?
Ce qui est certain, c’est que le prochain locataire du siège du 1er mai héritera d’une situation catastrophique en matière de non-respect de la réglementation, occasionnée surtout ces derniers mois à travers une multitude de dépassements et de transgressions à plusieurs niveaux (clubs sportifs amateurs, ligues et fédérations) lors du renouvellement de ces dites structures.
Certains se demandent d’ailleurs comment le nouveau ministre pourra faire face à l’immensité du chantier et par où doit-il commencer ? Sera-t-il amené à tout remettre en cause et recadrer de nouveau les processus de renouvellement des structures sportives sous tutelle ? Dure sera la réalité du terrain pour le prochain représentant du gouvernement, dans un secteur sensible et en proie à toutes les convoitises et les conflits d’intérêts.