Bien que la CAF ait pris sa décision d’attribuer l’organisation de la CAN-2025, ses responsables poursuivent leur manège dilatoire en laissant penser que rien n’est fait et que tout se décidera lors du congrès de Cotonou en juillet prochain.
La mission menée par les consultants du cabinet « Roland Berger Strategy » s’est achevée mercredi en Algérie. Le cabinet-conseil allemand a été chargé par la Confédération africaine de football à faire le tour des pays candidats à la CAN-2025 et constater si, vraiment, les dossiers présentés sont conformes avec la réalité du terrain.
Chaque candidat devra en ce sens fournir les preuves que sa candidature mérite d’être retenue par les membres du Comex suivant les orientations du cabinet allemand d’expertise. Celui-ci a dépêché pour la circonstance une équipe composée d’experts de ses filiales françaises. La barrière de langue pourrait être une des raisons qui a poussé la boite allemande à opter pour un partenaire français afin d’accomplir cette mission.
Lors de ce mini-périple à travers l’Algérie, M.M. Jean-Louis Romain (JLR Consulting), Victor Marçais (Senior Partner) et Antoine Bergue (Senior Consultant) ont eu à constater de visu que le dossier présenté en décembre dernier n’était pas un leurre.
D’ouest (Oran) à l’est (Annaba), en passant par Blida, Alger et Constantine, ils ont été guidés par des responsables Algériens de haut rang à l’exemple des walis des villes retenues dans le dossier de candidature fourni par l’Algérie à la CAF.
Les trois experts spécialisés chacun dans son domaine n’ont rien laissé au hasard. Leur manière d’inspecter a même provoqué l’incrédulité des internautes Algériens qui ont fait remarquer « ces messieurs avaient mieux à faire à vérifier la solidité des chaises des tribunes et des loges VIP, la densité des pelouses et la… qualité de l’air », écrivait l’un d’entre eux sur facebook.
Désormais, les trois émissaires de Roland Berger Strategy vont établir leurs rapports qu’ils adresseront sous-scellés à qui de droit. Nonobstant d’éventuelles recommandations de la part dudit cabinet, c’est aux membres du Comité exécutif de la CAF de rendre leur verdict qui, de l’avis de beaucoup d’observateurs, est déjà consigné bien avant la mise en place d’une telle structure de contrôle de qualité.
C’est sans surprise que le Maroc sera choisi parmi les 5 pays engagés dans la course. Patrice Motsepe et les membres de son Comité exécutif, si complices qu’ils sont, n’y pourront rien. Même pas de faire admettre que la CAF a observé une parfaite neutralité dans le traitement de cet épineux dossier d’attribution d’une compétition jadis confiée à des pays dépourvus de tous les moyens de confort aux acteurs, officiels et supporters.
Lobbying tous azimuts
Les observateurs qui sont parvenus à ce constat sont unanimes par dire que les jeux sont faits depuis juillet 2022 alors que la Guinée était encore l’organisateur désigné pour abriter la 35è édition de la Coupe d’Afrique des nations. Pour s’en convaincre, il ne faut pas être clerc. Il faut juste faire attention au fil des évènements dès lors que la CAF a prononcé « l’élimination » de la Guinée. Surtout depuis que l’Algérie, qui venait de réussir avec éclat les JM d’Oran, a montré son grand intérêt à reprendre l’organisation de cette fête du football. Une démarche que le voisin de l’ouest ne voyait pas d’un œil fraternel, bien au contraire. Dans leur quête de forcer le destin et passer pour un leader africain, les visionnaires du royaume chérifien ont mis en branle depuis belle lurette ce qu’ils appellent la diplomatie sportive multipliant les partenariats avec les pays du continent. Clubs et sélections de ces contrées déshéritées avaient latitude d’exploiter au dirham symbolique les infrastructures sportives de sa majesté.
En échange, Lekdjaâ récoltait voix et soutiens. Une œuvre qui a commencé juste après que le Maroc ait refusé d’accueillir la CAN-2015 au motif de la crise sanitaire d’Ebola qui frappait une partie de l’Afrique de l’ouest. Un tel projet ne pouvant se concrétiser sans le soutien des banques internationales tenues par les lobbys juifs ainsi que de la Fifa.
Sous l’impulsion de Gianni Infantino, cette dernière n’avait qu’un « chantier » en tête : court-circuiter Issa Hayatou et prendre en otage la CAF. Pour l’accompagner dans sa vile besogne qui mieux qu’un pays qui venait d’être sanctionné par le président camerounais de la Confédération.
Le patron de la FRMF fera, à cet effet, le « guide » à son maitre à Zurich. C’est Lekdjaâ qui sera derrière le parachutage d’Ahmad Ahmad au sommet du pouvoir du football africain. Et c’est encore lui qui exécutera le malgache deux ans plus tard après avoir senti qu’il commençait à mettre son nez là où il ne fallait pas.
L’allégeance à Infantino devenait un impératif pour bénéficier des aides techniques et financières de la Fifa. Il ne suffisait pas, pour ce faire, de montrer patte blanche. Il fallait aussi œuvrer pour que les projets d’Infantino aboutissent et le plus rapidement serait le mieux.
En renflouant les caisses des associations nationales africaines et en lançant quelques projets en direction de certains pays, Infantino savait qu’il aura carte blanche pour mettre en marche son grand projet d’une « Super Ligue africaine » dotée de 200 millions dollars. Le « monarque » absolu et grand argentier de la Fifa savait qu’il ne pouvait mener une telle mission directement. Et qu’il lui fallait un homme de confiance, qui n’aurait pas de « casseroles » dans la gestion du football, incarnant de surcroit une réelle force managériale et économique. L’Italo-suisse ne pouvait trouver mieux que le président des Mamelodi Sundowns Patrice Motsepe pour enfiler ce costume XXL. Le patron d’African Rainbow est une véritable mine de diamant et de tous les métaux précieux.
Bien sûr, Infantino et son « conseiller pour l’Afrique», Lekdjaâ, se devaient de s’assurer que le nouveau maitre de la CAF soit quelqu’un dont le football n’est qu’une affaire comme beaucoup d’autres. Le puissant homme d’affaires sud-africain ne serait alors qu’une « toupie » qu’on ferait tournoyer dans les sens voulus.
Faux suspense
En deux années, le cinquième président qu’a connu la CAF a réalisé tous les vœux de Gianni Infantino. Lors du Congrès électif de la Fifa à Kigali, le 16 mars, le candidat unique mesurait sa vraie puissance dans le giron du football international en obtenant un plébiscite en bonne et due forme. Les 54 bulletins favorables de l’Afrique étaient, à ce titre, un gage de réussite sur lequel Infantino s’est bien appuyé.
Bien évidemment, Motsepe ne pouvait oublier de récompenser celui qui a inspiré son intronisation à la CAF, le bien nommé Fouzi Lekdjaâ. Un retour sur investissement matérialisé par le prix accordé par la CAF au roi du Maroc en marge du Congrès de la Fifa au Rwanda pour « réalisations exceptionnelles » mais sans doute le cadeau des cadeaux que représente l’honneur d’organiser la CAN-2025 pour laquelle l’Algérie, ennemi juré du Makhzen, était en lice. L’avocat de formation qu’est Patrice Motsepe ne perdait pas son langage quand il s’adressait à ses hôtes, tous ses hôtes, qui lorgnaient abriter le rendez-vous des stars africaines en 2025.
En Algérie lors du CHAN, le dirigeant sud-africain a usé de propos mielleux, langoureux même, et a loué les grandes qualités des infrastructures sportives et autres de l’Algérie. Il aura les mêmes louanges quand il est de passe dans le royaume de Mohamed VI. Il ne manquera de prophétiser un duel Algérie- Maroc excluant les candidatures de la Zambie, et du duo Bénin-Nigéria.
Son SG, Veron Mosengo-Omba sera plus pratique. Il suivra à la lettre la feuille de route tracée par Lekdjaâ. Le président de la fédération royale marocaine mettait au parfum les médias de son pays de toutes les étapes qui jalonneront le processus d’attribution de la CAN… au Maroc. C’est en effet la presse marocaine qui a levé le secret sur la méthode choisie par la CAF pou arrêter son choix, les dates et les étapes que suivront les experts du cabinet allemand. En ne communiquant pas sur la mission accomplie par Roland Berger Strategy au Maroc.
Une visite qui a eu lieu de la plus faste des manières, l’équipe des Lions de l’Atlas affrontant à Tanger celle du Brésil pour un match de prestige. Ceci en parallèle à nombre de matches des qualifications de la CAN-2023 joués sur le sol marocain. Le président Lekdjaâ expliquait dans une vidéo publiée sur le site de la FRMF que son pays accueillait plus d’une vingtaine d’évènements internationaux de football pendant cette seule date Fifa impliquant des équipes africaines de toutes les catégories.
Pendant ce temps, l’instance africaine titubait, bégayait et courbait l’échine en observant à la lettre ordres et consignes.
L’éthique et l’équité clamées par Motsepe ne sont, en définitive, que des paroles en l’air. De la poudre aux yeux.
